L'UE a demandé aujourd'hui que des consultations soient organisées avec les États-Unis, à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), concernant des subventions massives accordées à Boeing. Pour l'UE, ces dernières sont contraires à l'accord relatif aux subventions et aux mesures compensatoires de l'OMC. Les États-Unis ont engagé plus tôt dans la journée une procédure concernant les aides européennes en faveur d'Airbus. Le commissaire européen chargé du commerce, Pascal Lamy, a déclaré: «L'initiative prise par les États-Unis de saisir l'OMC au sujet des aides européennes accordées à Airbus vise à détourner l'attention du déclin endogène de Boeing. Elle prouve également que les autorités américaines n'ont jamais voulu réellement renégocier l'actuel accord bilatéral UE/États-Unis de 1992. Si c'est le chemin que les États-Unis ont choisi d'emprunter, nous relevons le défi, notamment parce qu'il est grand temps de mettre un terme aux subventions massives et illégales qu'ils accordent à Boeing et qui portent préjudice à Airbus, en particulier celles qui sont destinées au nouveau programme 7E7 de Boeing. Il est néanmoins regrettable que les États-Unis aient préféré la voie contentieuse, qui pourrait déstabiliser le commerce et l'investissement, y compris dans le projet 7E7 de Boeing. Les travailleurs du secteur aéronautique peuvent compter sur la Commission européenne pour défendre leurs intérêts».
Le gouvernement américain subventionne Boeing depuis de nombreuses années, principalement en finançant les coûts de la recherche et développement par l'intermédiaire de la NASA, du Département de la Défense, du Département du Commerce et d'autres agences gouvernementales. Depuis 1992, Boeing a reçu près de 23 milliards d'USD de subventions américaines. Le gouvernement américain continue en outre à accorder à Boeing quelque 200 millions d'USD par an sous forme de subventions à l'exportation dans le cadre de «l'Extraterritorial Income Exclusion Act» (loi régissant l' exclusion des revenus extraterritoriaux qui succède à la loi sur les «FSC» - Foreign Sales Corporations), en dépit d'une décision de l'OMC déclarant expressément ces subventions illégales.
La violation la plus récente et la plus flagrante se traduit par des subventions massives, de l'ordre de 3,2 milliards d'USD, notamment sous la forme de réductions et d'exonérations fiscales et de financements d'infrastructures en vue du développement et de la production du Boeing 7E7, appelé «Dreamliner». Les preuves accumulées par la Commission européenne au fil des années démontrent clairement que ces subventions sont contraires à l'accord de l'OMC relatif aux subventions et aux mesures compensatoires.
Elles enfreignent aussi l'accord UE/États-Unis de 1992 sur le commerce des aéronefs civils de grande capacité, qui réglemente avec précision les formes et le niveau des aides gouvernementales que les Etats-Unis et l'UE accordent respectivement à Boeing et à Airbus.
En dépit d'invitations répétées de la Commission, les États-Unis refusent depuis plus de deux ans de participer aux consultations bilatérales prévues par l'accord de 1992. Donnant suite à une demande américaine datant de deux semaines seulement, la Commission a néanmoins accepté de débattre d'une éventuelle révision de l'accord de 1992, à condition que les échanges portent sur toutes les formes de subventions, y compris celles utilisées aux États-Unis, et que les autorités américaines mettent toutes les subventions destinées au 7E7 de Boeing en conformité avec l'accord de 1992.
Enfin, au moment même où ces discussions se tenaient (lors d'une réunion constructive qui a eu lieu le 16 septembre dernier), les États-Unis ont sollicité des consultations à l'OMC concernant les aides européennes en faveur d'Airbus. Il semble donc que la demande de renégociation de l'accord de 1992 présentée par les autorités américaines n'ait jamais été véritablement sérieuse.
Consultations à l'OMC et procédures de règlement des différends
La première étape du règlement d'un différend à l'OMC consiste en une demande de consultation de la part du plaignant. Le défendeur dispose de dix jours pour y répondre et doit engager des consultations dans un délai maximum de trente jours (sauf accord contraire des parties). Les consultations devraient viser à dégager une solution constructive au problème.
Si les consultations ne permettent pas de parvenir à un accord dans les soixante jours à compter de la réception de la demande, le plaignant peut demander à l'Organe de règlement des différends (ORD) de constituer un groupe spécial (le plaignant peut toutefois le faire au cours de cette période de soixante jours si les deux parties considèrent que les consultations ont échoué).
Une fois les membres du groupe spécial désignés, le plaignant dispose habituellement de trois à six semaines pour présenter sa première soumission écrite et le défendeur de deux à trois semaines pour y répondre. Suivent alors deux auditions et une deuxième soumission écrite. Une procédure de groupe spécial dure en moyenne douze mois. Elle peut être suivie d'une procédure d'appel qui ne devrait pas durer plus de quatre-vingt-dix jours.
Pour en savoir plus:
http://europa.eu.int/comm/trade/issues/sectoral/industry/aircraft/index_en.htm
http://europa.eu.int/comm/trade/issues/respectrules/dispute/index_en.htm