De nouvelles tendances mondiales telles que la croissance sans emploi, l'augmentation de la population jeune et l'épuisement des ressources naturelles sont des menaces qui mettent en péril l'essentiel des progrès réalisés lors des dernières décennies afin d'assurer aux individus la possibilité de gagner leur vie. C'est le constat que fait un nouveau rapport du Centre de développement de l'OCDE, présenté aujourd'hui à Paris dans le cadre du Forum Mondial sur le Développement.
Assurer des moyens de subsistance pour tous : Prévoir pour mieux agir, un rapport qui utilise une approche prospective en vue de développer cinq scénarios possibles de subsistance pour le monde en 2030, montre que la vulnérabilité et le risque de retomber dans la pauvreté extrême restent élevés dans un contexte mondial changeant.
Dans la plupart des régions en développement, 80 % des individus ont le sentiment de se battre, voire de souffrir, dans leur vie quotidienne, plutôt que de s'épanouir. En outre, des tendances émergentes dans les domaines économique, technologique, démographique, environnemental et de la sécurité pourraient avoir des conséquences négatives sur les moyens de subsistance, dans les décennies à venir. Ces derniers sont définis comme la capacité, présente et future, de subvenir à ses besoins et de s'épanouir.
« L'avenir des moyens de subsistance est précaire. Certaines tendances mondiales émergentes génèrent de nombreuses incertitudes et il nous faut trouver des moyens novateurs pour assurer la résilience des moyens de subsistance », indique Carl Dahlman, Directeur de la Recherche sur le développement mondial au Centre de développement de l'OCDE. Il ajoute : « Malgré tout, dans tous les pays à revenus faibles ou intermédiaires, les individus pensent généralement que l'avenir sera meilleur que le passé ou le présent. C'est dans la région de l'Asie de l’Est et Pacifique que l'optimisme est le plus répandu. »
S'épanouir, se battre ou souffrir ? Perceptions de la vie selon les régions
Source : Calculs de l'auteur à l'aide de données Gallup (n.d.), Gallup World Poll, Gallup Analytics, Gallup Inc., Washington DC, www.gallup.com/services/170945/world-poll.aspx
Parmi les tendances mondiales inquiétantes :
• L'accroissement des inégalités dû au partage non équitable des fruits de la croissance économique. Il est estimé que les plus pauvres, 66 % de la population mondiale, reçoivent moins de 13 % des revenus mondiaux, alors que le pourcent le plus riche en perçoit environ 15 %. Et environ 70 % des personnes sous-alimentées dans le monde vivent dans des pays à revenus intermédiaires.
• La croissance sans emploi dans les pays émergents et dans ceux en développement. Le cas de la Chine est frappant : entre 1991 et 2012, le PIB a été multiplié environ par neuf (ajusté en fonction de l'inflation), alors que l'emploi total stagnait et que le taux d'activité des 24-65 ans passait de 85 % à 77 %.
• La vitesse des avancées techniques et l'automatisation menacent les emplois. Y compris des fonctions administratives (« cols blancs ») telles que la comptabilité, les services juridiques ou la rédaction technique risquent d'être dépassées.
• Des fragilités financières persistantes. Ces dernières années, des mesures politiques de grande envergure ont été mises en œuvre afin de diminuer la fragilité des systèmes bancaires et financiers, mais il reste encore du chemin à parcourir pour que le système soit véritablement solide. Il est probable que les prochains grands chocs viennent des marchés émergents, dont les entreprises en plein essor ont profité de prêts massifs octroyés par le système financier mondial.
• La croissance de la population jeune en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, où la population active augmente respectivement de 8 et de 12 millions de personnes par an, va générer une pression importante s'il n'y a pas suffisamment d'emplois.
• Les enjeux environnementaux et liés aux ressources, notamment l'augmentation attendue des épisodes de grande sécheresse. D’ici 2050, plus de 40 % de la population mondiale sera soumise à un stress hydrique prononcé.
• Les nouvelles préoccupations en matière de sécurité, telles que la cybercriminalité et le terrorisme, viennent s'ajouter aux conflits traditionnels liés aux instabilités géopolitiques pour menacer encore davantage les moyens de subsistance.
Malgré tous ces défis, le rapport est optimiste et indique que les moyens de subsistance peuvent être garantis si des initiatives innovantes sont mises en œuvre. Il lance un appel afin que tous les niveaux concernés saisissent les opportunités suivantes :
• Au plan
mondial, les efforts doivent perdurer en faveur de plus de coordination et de coopération, pour permettre aux moyens de subsistance de se développer dans des conditions favorables, et ce dans de nombreux domaines : de la stabilité financière au changement climatique, du commerce international aux migrations, de la gouvernance de l'eau à la cyber-sécurité.
• Les gouvernements
nationaux peuvent être des catalyseurs de sociétés dynamiques ainsi que des soutiens dans les périodes difficiles. Par exemple, pour relever le défi de l'emploi, les gouvernements pourraient œuvrer en faveur de la formation tout au long de la vie et promouvoir des portefeuilles de moyens, composés de travail à temps partiel, de formations rémunérées et d'allocations chômage.
• Les initiatives
locales permettent de garantir les moyens de subsistance. Il peut s'agir, par exemple, de soutenir une économie locale partagée dynamique, au sein de laquelle les individus peuvent survivre grâce à un savant mélange d'initiatives sociales et entrepreneuriales qui impliquent des marchés d'échanges, de troc et de services virtuels. La mise en place de devises locales, également connues sous le nom de monnaies communautaires ou complémentaires pourrait, par exemple, préserver les communautés locales des turbulences et de la volatilité des marchés financiers mondiaux.
Pour de plus amples informations, les journalistes contacteront
Bochra Kriout (Tél.: +33 145 24 82 96) au Centre de développement de l'OCDE.
Notes :
Assurer des moyens de subsistance pour tous : Prévoir pour mieux agir est un projet soutenu par la Fondation Rockefeller
Le Centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est un lieu unique où pays membres de l’OCDE, économies émergentes et pays en développement peuvent se rencontrer sur un pied d’égalité pour échanger leurs connaissances et avoir un dialogue de politique étayé par des données probantes. La diversité de sa composition et son dimension intellectuelle garantissent la quête de solutions novatrices aux grands défis du développement.