L'Organisation mondiale de la Santé publie aujourd’hui un nouveau document pour aider les gouvernements, les associations de consommateurs et d’autres organismes concernés à protéger le public des risques liés à la consommation de viande de bœuf contaminée par l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB ou « maladie de la vache folle »). Ce document leur donne des informations générales sur la maladie et les moyens d’éviter sa propagation.
L’ESB ou « maladie de la vache folle » est une nouvelle maladie appartenant à un groupe mystérieux de pathologies liées entre elles et pour la plupart très rares. C’est en 1986 que des cas de cette maladie ont été signalés pour la première fois chez des bovins au Royaume-Uni. En 1996, une autre nouvelle maladie, le nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, ou nvMCJ, a été découverte chez des sujets humains et reliée à l’épidémie d’ESB parmi le bétail. On pense que l’origine de la maladie réside dans la consommation de viande contaminée ou d’autres produits alimentaires d’origine bovine.
Les deux maladies posent de redoutables problèmes scientifiques. Il est impossible de répondre avec certitude absolue à toutes les questions mais on est aujourd’hui bien renseigné sur les origines de l’épidémie d’ESB, sur les raisons de sa propagation, sur les tissus les plus dangereux à consommer ainsi que sur les raisons probables de l’apparition d’une maladie apparentée chez l’être humain. Chose plus importante encore, des recherches très approfondies corroborées par l’expérience pratique ont permis de cerner une série de mesures que les pays peuvent prendre pour éviter l’introduction de l’agent étiologique dans la chaîne alimentaire et donc assurer la sécurité de l’approvisionnement en viande. Lorsque toutes les mesures appropriées visant à minimiser l’exposition des sujets humains sont mises en oeuvre et contrôlées, la viande et les produits carnés d’origine bovine peuvent être considérés comme exempts de l’agent étiologique de l’ESB et donc comme ne comportant aucun risque de provoquer la nvMCJ chez l’être humain.
On trouvera ci-après quelques-unes des principales questions que les consommateurs doivent soumettre aux autorités nationales de la santé publique et de la santé vétérinaire. Ces questions sont particulièrement importantes dans les pays où des cas d’ESB ont été signalés mais, étant donné la longue période d’incubation et le fait que des aliments contaminés pour le bétail ont fait l’objet d’un vaste commerce international, les consommateurs et les pouvoirs publics dans d’autres pays seraient bien avisés d’examiner eux aussi ces questions.
Comment les bovins sont-ils nourris ?
L’ESB est manifestement liée au recyclage des carcasses de bovins, pratiqué pour récupérer les protéines des « farines de viande et d’os » afin de nourrir d’autres bovins. Si les bovins ne consomment pas de protéines provenant de carcasses de ruminants (bovins, ovins et caprins) il n’y a quasiment aucun risque d’ESB. Si les protéines provenant de ruminants sont utilisées pour ne nourrir uniquement des porcins et de la volaille et si elles ne risquent en aucun cas d’être mélangées avec des aliments pour animaux et de les contaminer dans les usines de fabrication ou sur les exploitations, le risque d’ESB dans le pays est alors insignifiant.
Les pouvoirs publics ont-ils mis en place un système de surveillance active de l’ESB ?
L’introduction récente de tests de dépistage rapide, obligatoires dans bien des pays, a considérablement amélioré le dépistage des cas. Ce dépistage « actif » des bovins infectés, suivi de leur abattage, empêche une grande partie des matériels de pénétrer dans la chaîne d’alimentation animale. La découverte de quelques cas dans les pays qui pratiquent la surveillance active est plus rassurante que l’absence de cas notifiés dans les pays où la surveillance laisse à désirer.
Les cas d’ESB sont-ils importés ou apparaissent-ils dans le cheptel national ?
Dans un troupeau de bovins, l’ESB n’est pas contagieuse et ne se propage pas d’un animal à l’autre. Des cas importés isolés ne peuvent déclencher une épidémie si les bovins touchés sont abattus et si l’on évite de recycler les carcasses pour alimenter le bétail. Ce qui est beaucoup plus inquiétant, c’est l’apparition de cas d’ESB parmi des bovins du cheptel national, car cela veut dire que certaines pratiques d’alimentation dans le pays sont déficientes et que bien d’autres bovins ont été exposés.
La viande provient-elle de jeunes bovins ?
La période d’incubation de l’ESB est très longue – quatre à cinq ans. Pendant ce temps, les bovins exposés à l’agent responsable de l’ESB ne présentent aucun symptôme et ce n’est que vers la fin de la période d’incubation que l’on trouve des matériels infectieux dans leurs tissus. Si les bovins sont abattus à un jeune âge (de préférence moins de 30 mois), la probabilité est beaucoup moins grande que la viande de veau ou de boeuf ou encore d’autres produits d’origine bovine puissent transmettre le nvMCJ.
Les tissus à haut risque sont-ils éliminés et détruits ?
L’agent responsable de l’ESB n’est pas réparti de la même façon dans l’organisme de l’animal ; il se concentre dans certains tissus, plus particulièrement l’encéphale et la moelle épinière, rattachée au système nerveux central. L’application de techniques strictes d’abattage consistant à enlever et détruire ces tissus à haut risque a un effet immédiat sur la sécurité alimentaire et peut protéger le consommateur même s’il y a eu des cas d’ESB dans le pays.
Des procédures sont-elles prévues pour éviter la contamination croisée dans les abattoirs ?
L’agent responsable de l’ESB, et probablement du nvMCJ, n’a jamais été décelé dans les tissus des muscules squelettiques des bovins, d’où proviennent la plupart des viandes de qualité. Cependant, une quantité extrêmement faible de l’agent étiologique – moins d’un gramme d’encéphale (la taille d’un grain de poivre) provenant d’un bovin infecté – suffit à provoquer la maladie chez un bovin. Quant à l’être humain, on ne connaît pas la quantité capable de provoquer l’infection mais elle pourrait elle aussi être très faible. C’est pourquoi il est vital d’éviter une contamination croisée. De bonnes pratiques d’abattage garantissent que les matériels à haut risque ne pourront entrer en contact avec des matériels par ailleurs sains et les contaminer.
Existe-t-il d’autres produits carnés qui pourraient contenir l’agent de l’ESB ?
L’utilisation de brosses métalliques ou d’autres outils mécaniques pour récupérer des lambeaux de viande attachés aux os et à la colonne vertébrale peut contribuer à extraire des tissus nerveux infectieux qui viennent contaminer une viande par ailleurs saine. Cette « viande séparée mécaniquement » est utilisée dans les produits carnés traités. Selon certains experts, l’agent de l’ESB a été transmis à l’être humain par des produits contenant de la viande séparée mécaniquement qui avait été contaminée par du tissu nerveux. Les techniques qui permettent d’éviter l’inclusion de tissu nerveux dans la viande séparée mécaniquement confèrent une protection importante, particulièrement dans les pays à haut risque.
Les bonnes pratiques sont-elles rigoureusement contrôlées ?
Il ne suffit pas de recommander des pratiques sûres. Elles doivent également être rigoureusement appliquées, dans l’idéal par l’intermédiaire de la législation, et contrôlées moyennant des inspections des autorités responsables de la santé vétérinaire et de l’alimentation.
A consommer sans risque – Compte tenu des connaissances actuelles, les spécialistes scientifiques s’accordent à considérer que certains produits d’origine bovine sont sans danger, quelle que soit la situation dans le pays au regard de l’ESB. Parmi les produits dont la consommation ou l’utilisation est jugée sans risque figurent le lait et les produits laitiers, la gélatine préparée exclusivement à partir de cuirs et de peaux et le collagène préparé exclusivement à partir de cuirs et de peaux. On n’a jamais noté d’infectivité des tissus des muscles squelettiques, d’où proviennent la plupart des viandes de qualité. Un certain nombre de spécialistes pensent que la viande provenant des muscles squelettiques est tout aussi sûre que le lait et les produits laitiers, pour autant qu’elle n’ait pas été contaminée lors des opérations d’abattage.