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Date :  2017-02-02
langue :  Français
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Les femmes d’Europe face à l’austérité et à la dette publique


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La dette, cheval de Troie d’une guerre sociale sans précédent contre les peuples d’Europe, n’est nullement neutre du point de vue du genre. Les mesures d’austérité imposées en son nom sont sexuées autant dans leurs caractéristiques que dans leurs effets.

Pour l’Union européenne, le FMI et leurs gouvernements complices, le seul moyen de résoudre la crise est d’appliquer de rigides mesures d’austérité. Selon la doxa néo-libérale, elles permettraient aux États endettés de rembourser leur dette et de retrouver le sacro-saint équilibre budgétaire. En réalité, ce tout-austéritaire n’engendre qu’un saccage social sans précédent au sein des pays sommés de l’appliquer. Le désastre humanitaire qui ravage la Grèce depuis 2010 est l’effroyable matérialisation de l’application des Memoranda of Understanding (MoU) |1|. Accompagnés de réformes structurelles socialement rétrogrades, ils détruisent le pays à coup de privatisations, augmentation de taxes injustes telle que la TVA, coupes dans les salaires, les pensions, la santé, l’éducation, la culture, etc. Outre cette antinomie entre développement social et austérité, toute analyse quelque peu approfondie de la crise de la dette démontre sans ambiguïté qu’elle est sexuée tant dans ses caractéristiques que dans ses effets. Loin de s’attaquer aux responsables de cette crise, aux riches et aux grands patrimoines, l’austérité touche les populations les plus fragilisées, les plus précaires et donc encore, malheureusement, majoritairement les femmes et plus particulièrement, celles qui sont les plus vulnérables (les mères célibataires, les femmes jeunes, âgées, migrantes, les femmes provenant d’une minorité ethnique, du milieu rural…). Tout comme les plans d’ajustement structurel ont appauvri les femmes du Sud, les plans d’austérité sont en train de saigner celles de l’Europe. Privatisations, libéralisations et restrictions budgétaires sabrent les droits sociaux des femmes, accentuent leur pauvreté, durcissent et aggravent les inégalités entre les sexes et sapent les ‘conquis’ féministes.

Nous analyserons tout au long de cet article comment les politiques de la dette font régresser les droits sociaux-économiques des femmes et sanctionnent leur émancipation partout en Europe.


Les femmes au coeur de la destruction de la protection sociale

Pour réaliser des économies en vue de gérer la « crise de la dette », les budgets de protection sociale subissent en Europe des restrictions draconiennes. Partout, on assiste à des diminutions des allocations de chômage, des allocations sociales, des aides aux familles, des allocations de maternité, des prestations aux personnes dépendantes, etc.

Ces coupes affectent particulièrement les femmes dans la mesure où, parce qu’elles assument encore le rôle de responsables principales de la famille et sont plus précaires financièrement, elles sont plus dépendantes des allocations sociales que les hommes. Par le fait que les prestations et allocations sociales constituent une part non négligeable de leur revenu en comparaison avec les hommes |2|, ce sont elles qui sentent le plus douloureusement les effets de leur diminution dans leur vie de tous les jours. es groupes les plus vulnérables sont les mères célibataires, les femmes âgées et les migrantes.

Ce constat est particulièrement criant dans deux domaines :

Les mesures d’austérité enrayent les politiques familiales des États

La décision de la Commission européenne en juillet 2015 de retirer la proposition de loi pour l’augmentation du congé de maternité de 14 à 18 semaines est un exemple de l’échec de l’UE, de ses États membres, de s’investir pour une protection digne et humaine des femmes européennes |3|.

Au Royaume-Uni, la subvention de bonne santé pendant la grossesse, les allocations familiales, les crédits d’impôts liés à la naissance d’un enfant ont tous été restreints ou gelés. D’autres réductions de prestations sociales, comme celles des aides au logement, touchent les femmes de façon disproportionnée. De fait, davantage de femmes que d’hommes dépendent de ces indemnités. Une étude commandée par le syndicat britannique TUC relève que, suite à toutes ces mesures, les mères célibataires perdent pas moins de 18 % de leurs revenus nets |4|.

Alors que les femmes sont souvent désavantagées en termes d’accès et de niveau des allocations de chômage (en Allemagne, en 2010, sur les 47 % de femmes sans emploi seulement 28 % touchent des allocations de chômage |5|) |6|, les politiques d’austérité ambitionnent encore de les diminuer. Ainsi, en Belgique, après la réforme Di Rupo qui prévoyait une dégressivité accrue des allocations de chômage, la fin de l’indemnité à vie et le durcissement de la Politique d’accompagnement des chômeurs, le nouveau gouvernement MR-NVA a mis en place une véritable chasse aux chômeurs. Ces mesures restrictives touchent particulièrement les femmes : elles composent 61 % des personnes exclues du chômage en 2016 |7|.


Les politiques d’austérité minent les programmes instaurant l’égalité des genres

Alors que les mesures de promotion de l’égalité des sexes ne doivent pas être un « luxe » réservé uniquement aux périodes de croissance économique, on constate très clairement que la crise de la dette entraîne une diminution, autant de l’attention des politiques que des financements pour les mécanismes d’égalité des genres, ainsi que pour la mise en pratique des lois en la matière. En Espagne, le ministère pour l’Égalité a été supprimé et absordé par le ministère de la Santé en 2010 tandis qu’en Italie, le budget des politiques familiales est passé de 185,3 à 19,8 millions d’euros entre 2011 et 2013 (une diminution de 89 %) |8|. Or, l’importance de l’existence de elles politiques est particulièrement criante en période de récession.

Les associations de promotion des femmes sont elles aussi dans l’oeil du cyclone des restrictions budgétaires imposées au nom de la dette. Partout en Europe, plannings familiaux, maisons des femmes, maisons d’accueil pour femmes battues, violées et maltraitées, lignes d’écoute et d’aide téléphonique pour femmes en situation de crise, refuges pour femmes et enfants… doivent faire face à une diminution de leurs subventions autant publiques que privées. Ainsi, bien que la crise soit synonyme d’une féminisation de la pauvreté et d’une accentuation de leur précarité, tant financière que psychologique et physique (les chiffres attestent que les violences domestiques augmentent avec la crise), les associations de femmes - qui pouvaient leur offrir soutien et perspectives - deviennent de moins en moins accessibles et doivent réduire la quantité et la qualité des services qu’elles peuvent fournir aux femmes.


De l’État social à la « Mère sociale »

L’austérité constitue une attaque en règle contre les services publics : services sociaux, santé, éducation, énergie, transports, infrastructures… Tout y passe ! Tous sont réduits, supprimés, privatisés et/ou leurs frais d’utilisation augmentent considérablement. Ce saccage de l’État social touche en premier lieu et triplement les femmes. Pourquoi ?

- Étant majoritaires dans la fonction publique |9|, elles sont les premières victimes des politiques de licenciements massifs, imposées partout en Europe ;
- Les femmes sont également les usagères majoritaires des services publics. Leur participation au marché du travail dépend de services à l’enfance accessibles, elles ont plus recours aux services de santé pour elles-mêmes (cf. soins gynécologiques, liés à la grossesse, à la maternité mais aussi à un temps de vie plus long…) ou pour leurs proches, elles utilisent plus les transports publics, etc. Des services collectifs de qualité, en nombre suffisant et abordables financièrement constituent des leviers incontournables de l’égalité des sexes, de l’autonomie financière des femmes et, à terme, de leur émancipation ;
- Enfin, ce sont elles qui doivent, via une augmentation de leur travail non rémunéré et invisible, assurer les tâches de soins et d’éducation délaissées par la fonction publique. Dans bien des cas, cette carence de services publics est suppléée par le travail des femmes migrantes et sans papier, très souvent exploitées, sans accès à aucune forme de protection sociale et exposées à des violences racistes et sexistes. On assiste ainsi à une véritable substitution des rôles et des responsabilités essentielles de l’État vers le privé et donc vers les femmes, les empêchant de participer pleinement à toutes les sphères de la vie. Au nom de la dette publique, une translation a lieu : du concept d’« État social » on passe à celui de « Mère sociale ». Et ce, gratuitement, pour réduire les dépenses, rembourser les banquiers et payer la dette : elle n’est pas belle la crise ?! Les politiques d’austérité, en pénalisant le droit à l’emploi rémunéré des femmes et en les obligeant à regagner la sphère privée pour y rendosser leur rôle dit « traditionnel » de mère et/ou d’épouse au foyer sont en outre de puissantes courroies de réactivation d’une idéologie patriarcale, conservatrice et sexiste.

La diminution des financements publics résultant des politiques austéritaires dans le secteur de la santé a des répercussions directes sur la santé sexuelle et reproductive des femmes ainsi que sur leurs conditions de travail (cf. elles sont travailleuses majoritaires dans le domaine de la santé). Partout, en Europe, toujours moins de subsides publics sont attribués à la prévention du VIH, aux IVG, aux plannings familiaux, aux services de santé pré et post-natals et aux soins de santé préventifs des femmes. Les maternités et centres de gynécologie sont généralement les premiers services hospitaliers à être supprimés au nom des économies à réaliser pour rembourser la dette. Ainsi, durant la dernière décennie, pas moins de 20 % des maternités françaises ont été fermées |10|.

En Grèce, avant l’arrivée de Syriza au pouvoir, la Troïka avait obligé les femmes à verser 1000 € pour mettre au monde leurs enfants |11|.

Relevons également que dans les pays où elle a été conquise de hautes luttes, l’autodétermination reproductive des femmes est sans cesse attaquée. Loin d’être généralisé en Europe, le droit à l’avortement est toujours fragile. En Espagne, en 2014, il a bien failli ne plus exister. Sans les manifestations massives de rue et la solidarité internationale, les femmes de ce pays ne pourraient plus pratiquer l’IVG. De plus, si le droit à l’avortement est généralement le résultat de mobilisations intenses, son application réelle est loin d’être garantie. En effet, parallèlement aux pressions des lobbies politico-religieux, des contraintes purement pragmatiques telles que des difficultés d’accès aux services et centres d’IVG, des délais d’attente trop longs, un manque de médecins spécialisés et un défaut manifeste d’information empêchent de nombreuses femmes de recourir pratiquement à l’avortement. En entravant les droits sexuels et reproductifs des femmes, la dette n’annihile pas seulement la liberté des femmes de choisir quel type de vie elles veulent mener et à quel moment mais elle renforce simultanément des courants de pensées réactionnaires pour lesquels les femmes sont avant tout des mères et de préférence des mères au foyer.

Lorsqu’on prend en considération l’ensemble des préjudices causés par le « système dette » sur la santé publique et par extension sur celle des femmes, une conclusion s’impose : avec l’application de l’austérité, la santé n’est plus considérée comme un droit humain fondamental mais comme une marchandise qu’il faut acheter sur le marché. Toute notion d’assistance et de service public accessible à tou-te-s indépendamment de ses revenus et/ou de sa position sociale à été évincée. Seule la logique du profit privé prédomine.


Mobilisations féministes face à la crise

Comme on l’a vu au-travers de cet article, la dette et ses politiques sont contraires à toute visée émancipatrice des femmes : non seulement elles sapent leur autonomie financière ainsi que toute possibilité de mieux pouvoir concilier leurs différents temps de vie |12| – via, entre autres, l’accès à des services publics – mais de plus, elles ambitionnent de leur faire supporter majoritairement le prix de la crise. À cause de leur position plus fragile sur le marché du travail et, dès lors, d’un pouvoir de négociation amoindri, les femmes acceptent plus « facilement » que les hommes des conditions de travail précaires, avec un salaire diminué et sans sécurité sociale. Elles sont en première ligne des coupes dans les secteurs de la santé, de l’éducation, du secteur associatif où elles sont simultanément usagères et employées majoritaires. Partout l’austérité impulse une féminisation de la pauvreté, une précarisation de l’emploi féminin, une augmentation considérable de leur charge de travail gratuit fourni pour amortir les effets dévastateurs de la crise et, de plus, elle détruit les ‘conquis’ féministes… Or, alors que les femmes supportent les pires conséquences de la crise, elles n’ont à payer aucune dette de quelque nature soit-elle ! Ce sont elles les véritables créancières au niveau national et international. Elles sont titulaires d’une énorme dette sociale. Sans leur travail gratuit de production, de reproduction et de soins aux personnes, nos sociétés péricliteraient tout simplement.

Partout en Europe, les mouvements féministes travaillent à renforcer la résistance des femmes face à la destruction de leurs droits. Début 2011, a été créé, en Grèce, l’Initiative « Femmes en mouvement contre la dette et les mesures d’austérité ». L’objectif de ce mouvement indépendant, pionnier en Europe dans la lutte contre la dette et les mesures d’austérité, est de parvenir à mettre sur pied un front coordonné des féministes européennes contre le « système dette ».

Ces femmes ont exigé des audits des comptes publics nationaux et locaux mais aussi des audits d’hôpitaux, de centres sociaux, d’écoles. Elles ont initié et participé aux mouvements « nous ne payons pas » qui refusent de payer les transports publics, dont le prix a triplé pour rembourser la dette en Grèce, les nouveaux péages routiers et les nouveaux impôts injustes imposés aux pauvres et à la classe moyenne. Fin janvier 2014, elles ont contribué à la création d’une maison de solidarité des femmes, espace ouvert et autogéré avec pour objectif de donner de l’aide à toutes celles en souffrance à cause de l’austérité, aux femmes qui connaissent la pauvreté absolue et sont en détresse.

Ces dernières années une solidarité européenne extraordinaire s’est développée à partir de beaucoup de pays européens vers la Grèce en collaboration avec l’Initiative « Femmes en mouvement contre la dette et les mesures d’austérité » : caravanes citoyennes depuis l’Italie, la France, la Belgique etc. continuent de s’organiser pour apporter médicaments, biens de première nécessité et pour sensibiliser les autres peuples européens à la crise humanitaire que ce pays traverse.

La Marche mondiale des femmes a organisé en 2015 une caravane féministe pour apporter le soutien de cette organisation à toutes les femmes d’Europe en lutte contre les politiques d’austérité, le patriarcat et la répression gouvernementale |13|.

Le 6 mars 2015 le collectif « Elles s’en mêlent », Vie Féminine Bruxelles, le CADTM, le Monde selon les Femmes, la Marche mondiale des femmes et la CSC (Confédération des syndicats chrétiens) Femmes, ont lancé publiquement le Comité d’action « V’là la facture ! ». Son objectif consiste à mettre en lumière les impacts spécifiques pour les femmes des mesures d’austérité décidées par le gouvernement belge : manque de place pour l’accueil des enfants et des personnes âgées, fin de l’allocation d’insertion illimitée dans le temps |14|, etc. Les militantes du Comité « V’là la facture ! » refusent la socialisation des dettes des banques et les mesures austéritaires qui coupent les dépenses publiques. Pour elles, l’État a une dette non pas envers les banques mais envers les femmes qui travaillent gratuitement faute de services publics suffisants et de qualité. De cela l’idée d’envoyer une facture à l’État : « on enverra la facture à l’État pour qu’il rembourse toutes les heures de travail gratuit que nous faisons pour compenser, entre autres, le manque de crèches et de soins pour les personnes âgées. Nous voulons qu’il investisse ces sommes dans le refinancement des services publics et de la protection sociale ».

La plate-forme demande :
- l’arrêt immédiat de ces plans d’austérité imposés au nom d’une dette qui n’a pas servi les intérêts des populations ;
- un audit féministe afin d’identifier la dette illégitime et l’impact spécifique de l’austérité sur les femmes suite au démantèlement des services publics et de la protection sociale. Tout l’argent économisé sur le dos de femmes doit être réinvesti dans les secteurs sociaux, notamment dans le refinancement des allocations sociales et des services d’accueil à la petite enfance et aux personnes en grande dépendance ;
- une fiscalité qui cesse de favoriser les riches.

Ainsi, via une diversité et une multiplicité des modes d’actions, les femmes sont bel et bien en marche contre la dette illégitime. Leurs initiatives, détermination et solidarité renforcent les mouvements sociaux qui dénoncent le tout-austéritaire au profit exclusif de la finance et contre les peuples. En s’appropriant et en incarnant les luttes et revendications des féministes, ces mouvements n’en seront que plus représentatifs et emplis des énergies des populations les plus touchées par cette austérité absurde, récessive et complètement injuste qui détruit toute forme d’État social susceptible de contribuer à l’émancipation véritable de toutes et de tous.

Cet article est extrait du magazine du CADTM : Les Autres Voix de la Planète

Notes

|1| « Plans de sauvetage économique » imposés à la Grèce par la Troïka

|2| Au Royaume-Uni, en moyenne un cinquième du revenu des femmes est composé de prestations d’aides sociales et d’exemptions de taxe en comparaison à un dixième pour les hommes. WDG, « A Gender Impact Assessement of the Coalition Government Budget », June 2010

|3| http://europa.eu/rapid/press-releas..., http://www.womenlobby.org/Withdrawa...
Maternity-Leave-Directive-is-a-blow-for-women-s-rightsin ?lang=en

|4| Confédération européenne des syndicats – CES, Enquête du 8 mars 2011, p. 19. https://www.etuc.org/IMG/pdf/8_Marc...

|5| M. Jespen, European Trade Union Institute (ETUI), « Aspects contemporains de la crise au féminin », intervention durant le Séminaire Le nerf de la guerre…des sexes. Rapports sociaux et argent organisé par L’Université des femmes, Bruxelles, 16 décembre 2010.

|6| Les systèmes de protection sociale continuent d’être construits sur le concept d’une carrière ininterrompue au cours d’une vie professionnelle allant de 40 à 45 ans, ce qui correspond rarement au cycle de la vie professionnelle des femmes.

|7| http://www.lesoir.be/1126644/articl...

|8| Malfer L.& autres, Family audit : la certificazione familiare aziendale, Franco Angeli, 2014

|9| En Europe, les femmes représentent 78 % de la force de travail des services sociaux et de santé et 60 % des enseignant-e-s des secteurs primaires et secondaires. Voir Oxfam International/ European Women’s Lobby, Op. Cit., p 24-25

|10| « Ces maternités qui doivent s’améliorer… ou fermer », Guillaume Guichard, 22/01/2015, Le Figaro, http://www.lefigaro.fr/conjoncture/...

|11| http://www.gaucherepublicaine.org/i...

|12| Cf. équilibre entre temps de vie professionnel, familial et personnel des femmes

|13| https://marchemondialedesfemmes2015...

|14| L’allocation d’insertion est une allocation pour demandeurs/euses d’emploi accessible après les études. Depuis le 1er janvier, les jeunes sans emploi qui ont plus de 25 ans ne pourront plus bénéficier d’une allocation d’insertion.


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