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Date :  2016-05-23
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Il faut relancer la coopération financière dans le monde


« La monnaie n’a pas de pattes pour circuler », disait l’économiste suédois Knut Wicksell à la fin du XIXe siècle. Manière amusée d’évoquer la difficile traçabilité de l’argent, bien avant qu’il ne soit question d’Internet, de bitcoin, de cartes prépayées et autres délices de l’innovation. Avec les « Panama papers », l’histoire bégaie…

Pourtant, la crise mondiale a provoqué des réactions salutaires. Au plan international, il faut saluer le leadership de l’OCDE dans la lutte contre les paradis fiscaux. Le Gafi hébergé à l’OCDE, avec sa liste de territoires non coopératifs, a poussé de nombreux pays à multiplier les accords bilatéraux en matière d’échange d’informations afin de sortir de ladite liste… Pour certains Etats, la sortie a été précipitée, fondée sur l’apparence de la conformité plus que sur sa réalité. Il faut durcir les critères et se polariser un peu moins sur les accords bilatéraux, un peu plus sur une batterie de critères convergents. N’oublions pas que si la Suisse a fini par lever son secret bancaire, c’est sous la pression des Américains qui menaçaient de retirer la licence des banques suisses aux Etats-Unis.

En interne, des progrès sont également intervenus . La lutte contre le financement du terrorisme ajoute des paramètres supplémentaires et complexes par rapport à la chasse contre le blanchiment de l’argent. Tracfin, la cellule compétente de Bercy, traduit cette évolution vers plus de financements à tracer, plus de déclarations de soupçons de la part des intermédiaires financiers et plus de sanctions. Le filet s’étend, mais les défis demeurent, pour plusieurs raisons.

L’innovation financière n’a pas de limites, pour le meilleur et pour du moins bon…Le petit jeu du chat et de la souris entre la régulation et l’innovation va continuer, avec des régulateurs s’efforçant de réguler des zones de non-transparence comme celles des monnaies virtuelles (le bitcoin, mais pas seulement), agréant et surveillant les plates-formes de finance participative (« crowdfunding ») en plein essor, mettant en musique les nouveaux textes européens visant à mieux contrôler le « shadow banking » (finance parallèle) ou les opérations de gré à gré sur instruments dérivés. Les régulateurs se doivent d’être réactifs, comme récemment illustré en France par leur intervention à propos des arnaques via des options binaires sur les devises. Tout cela sans perdre de vue qu’aujourd’hui, si les microfinancements crapuleux sont de plus en plus sanctionnés, une part non négligeable des macroflux liés au financement du terrorisme échappent aux exigences de la traçabilité.

Une autre limite tient au fait que certains des pays les plus avancés nourrissent en interne leurs propres paradis fiscaux. Difficile alors pour eux de tancer, à la table du G20 ou ailleurs, les Etats non coopératifs au sens de l’OCDE ! La coordination internationale bute sur plusieurs obstacles. D’abord, l’extraterritorialité de fait des règles américaines, nourrie par le rôle international du dollar, heurte les partenaires des Etats-Unis. On l’a vu à de multiples reprises, depuis la loi Sarbanes-Oxley jusqu’aux sanctions unilatérales à l’égard de certaines banques européennes. La coopération internationale requiert de la réciprocité plus que de l’extra-territorialité. En second lieu, autant les sanctions dans l’ordre interne sont efficaces, autant celles au plan mondial sont inexistantes ou ineffectives. Le G20, le Conseil de stabilité financière, l’OICV, le Gafi… émettent des recommandations, donc du droit « mou » (« soft law »).

Dans de nombreux cas , ces recommandations ne sont pas suivies d’effets, faute de sanctions. Comment « durcir » les standards arrêtés en commun ? C’est l’un des défis d’une nouvelle gouvernance mondiale. La réponse n’est pas technique, elle est politique, et le choix évoqué dès 2008-2009 reste ouvert : ou créer une OMF (Organisation mondiale de la finance) dotée des pouvoirs nécessaires, ou, préférable si l’on veut éviter « l’inflation institutionnelle », conférer de nouvelles compétences et de nouveaux leviers à des organismes internationaux existants comme l’OCDE et le FMI.


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