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Date :  2014-11-06
langue :  Français
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Le contestable pouvoir économique de la Chine


La Banque Mondiale à récemment annoncé que l’économie de la Chine devrait surpasser celle des Etats-Unis cette année, une donnée mesurée selon l’indice de parité de pouvoir d’achat (PPA). Mais ceci est loin d’être une description holistique du statut économique global de la Chine.

Si la PPA peut être utile pour comparer les niveaux de richesse entre pays, elle est aussi substantiellement liée de la taille de la population. L’Inde, la dixième puissance économique selon le cours du change actuel entre le dollar américain et la roupie indienne, se classe troisième selon l’indice de PPA. De plus, les ressources de pouvoir, comme le coût du pétrole importé, ou un moteur d’avion de chasse avancé, sont mieux appréciées selon les taux de change des devises utilisées pour les régler.

La taille totale est bien sûr un aspect important de la puissance économique. La Chine est dotée d’un marché attractif et est le plus gros partenaire commercial de nombreux pays – autant d’importants moyens de pression que les dirigeants chinois n’hésitent pas à actionner.

Mais même si le PIB global de la Chine surpasse celui des Etats-Unis (quelle que soit la mesure utilisée), les deux économies maintiendront des structures et des niveaux de sophistication très différents. Le revenu par habitant de la Chine – une mesure plus précise de la sophistication économique – ne représente que 20% de celui des Etats-Unis et il lui faudra des décennies pour rattraper l’Amérique (si elle y parvient jamais.)

En outre, comme l’ont reconnu les responsables et les chercheurs chinois, si la Chine a dépassé l’Allemagne en 2009 en tant que plus gros exportateur mondial en terme de volumes, il lui reste encore à se développer en une véritable nation commerciale « forte » ; les échanges commerciaux dans les services sont encore ternes et sa production reste à faible valeur ajoutée. Et la Chine manque de marques véritablement fortes à l’international, de celles qui font le bonheur des puissances américaine et allemande : 17 des 25 marques globales sont effectivement américaines.

Le retard de sophistication de la Chine se reflète aussi dans ses marchés financiers, qui ne représentent qu’un huitième de ceux de l’Amérique, alors que les étrangers ne sont autorisés à détenir qu’une part dérisoire de la dette chinoise. La Chine a essayé d’élargir sa puissance financière en encourageant l’usage international de sa monnaie, mais les échanges commerciaux en renminbi ne représentent toujours que 9% du total global, comparés à 81% des parts en dollars.

Les réserves massives en devises étrangères de la Chine – les plus importantes au monde, avec près de 4 billions de dollars – ne seront pas suffisantes pour actionner son levier financier, à moins que les autorités ne créent un marché obligataire large et ouvert avec des taux d’intérêt libéralisés et une monnaie facilement convertible. Ces réserves ne donnent pas non plus un avantage direct de négociation sur les Etats-Unis dans la mesure où les liens d’interdépendance reposent sur des asymétries.

La Chine détient des dollars qu’elle perçoit en échange de ses exportations vers l’Amérique, tandis que cette dernière, en ouvrant son marché aux produits chinois, aide à générer croissance, emploi et stabilité en Chine. Oui, la Chine pourrait mettre l’économie américaine sur les genoux en pratiquant un dumping avec ses dollars, mais cela aurait en retour de sérieuses conséquences pour elle-même.

Les différences entre la Chine et les Etats-Unis en matière de sophistication économique s’étendent aussi à la technologie. En dépit d’importantes réalisations, la Chine est plus investie dans la copie d’inventions étrangères que dans le développement d’innovations technologiques propres. La Chine n’a jamais émis autant de brevets qu’aujourd’hui, mais peu d’entre eux constituent des inventions révolutionnaires. Les Chinois se plaignent d’ailleurs souvent de ne pouvoir produire que des jobs iPhone, et non pas des Steve Jobs.

Dans les décennies à venir, la croissance du PIB chinois va ralentir, comme ce fut le cas dans toutes les économies ayant atteint un certain degré de développement – généralement le niveau de revenu par habitant, en mesure de PPA, que la Chine approche. Mais la Chine ne peut éternellement reposer sur des technologies importées et une main d’œuvre bon marché pour soutenir sa croissance. Les économistes de Harvard Lant Pritchett et Lawrence Summers ont calculé que la régression ramènerait en moyenne la croissance de la Chine à 3,9% dans les deux prochaines décennies.

Mais cette simple estimation statistique ne prend pas en considération les sérieux problèmes auxquels la Chine devra faire face dans les années à venir, comme les inégalités croissantes entre les populations rurales et urbaines et entre les régions côtières et intérieures. D’autres défis majeurs incluent un secteur public paralysé et inefficace, une dégradation environnementale, une migration interne massive, un filet de sécurité sociale inapproprié, la corruption, et une autorité de la loi insuffisante.

De plus, la Chine va être de plus en plus confrontée à des conditions démographiques difficiles Après avoir appliqué la politique de l’enfant unique pendant plus de trente ans, la main d’œuvre chinoise devrait être à son maximum en 2016, avant que le nombre de personnes âgées dépendantes ne dépassent celui des enfants en 2030. D’où les inquiétudes soulevées par une population qui deviendrait vieille avant d’être riche.

Le système politique autoritariste de la Chine a fait la preuve de son impressionnante capacité à parvenir à des objectifs ciblés, que ce soit pour la construction d’un réseau ferré à grande vitesse ou la création de toutes nouvelles villes. Ce à quoi rechigne le gouvernement est de consentir aux demandes pressantes de participation politique – ou même de démocratie – souvent associées à la hausse du PIB par habitant. Le changement politique adviendra-t-il lorsque le PIB nominal par habitant, aujourd’hui d’environ 7 000 dollars, avoisinera 10 000 dollars, comme ce fut le cas chez les voisins Coréens et Taïwanais ?

Reste à savoir si la Chine parviendra à concevoir une formule qui prenne en considération une classe moyenne en pleine expansion, les inégalités régionales, et, dans de nombreuses régions, les minorités ethniques. Son retard en matière de sophistication économique pourrait compliquer la situation. Quoi qu’il en soit, cela signifie que le PIB agrégé – quelle que soit sa formule de calcul – est inapproprié pour déterminer quand – et si – la Chine dépassera les Etats-Unis en matière de puissance économique.

Traduit de l’anglais par Frédérique Destribats


Pays : 
- Chine   

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