Et encore, le chiffre de 19 millions d’enfants pauvres « n’inclut même pas les enfants des demandeurs d’asile, des immigrés ou des sans-papiers », souligne l’auteur du futur rapport sur la pauvreté infantile, l’Allemande Gabriele Zimmer (Gauche Unitaire Européenne/NGL). L’ampleur du défi auquel fait face l’Europe est donc grande. Pourtant, comme le souligne l’Irlandais Proinsias De Rossa (Parti Socialiste Européen), « il est surprenant que dans les pays européens, on sache comment faire pour lutter contre la pauvreté des enfants, mais que le problème persiste toujours ».
Les racines de la pauvreté infantile
Lors de l’audition, le lien entre pauvreté infantile et pauvreté des parents a clairement été mis en avant. Parmi les causes de ce phénomène : le travail irrégulier des parents, comme l’a souligné le britannique Stephen Hugues (Parti Socialiste Européen): « Les familles doivent disposer de revenus décents pour offrir une enfance décente à leurs enfants ».
La situation est encore plus délicate dans le cas de parents isolés. Souvent jeunes, ils doivent pouvoir poursuivre leur éducation, a défendu lors de l’audition le député Proinsias De Rossa : « Pourquoi devraient-ils perdre leurs aides sociales s’ils suivent une formation ? », a-t-il demandé. Selon lui, le problème de pauvreté persiste surtout du fait de l’idéologie qui différencie un Etat libéral d’un Etat interventionniste.
Se donner les moyens de combattre la pauvreté
Présent lors de l’audition, l’expert de l’OCDE sur le bien-être des enfants, Dominic Richardson, a rappelé que la pauvreté en Europe devait être une priorité pour les politiciens. Il a notamment réclamé plus d'aides financières pour encourager les parents à travailler ainsi que des aides en matière de puériculture, d'assistance sociale et de formation pour les parents.
Faut-il des politiques ciblées ou bien des politiques générales de lutte contre la pauvreté ? Pour Gabriele Zimmer, la pauvreté des enfants ne peut être combattue indépendamment, car « elle mène à la pauvreté adulte ». Une opinion corroborée par un expert de l'Université Nationale Irlandaise, Hugh Frazer : selon lui, les pays ayant des politiques universelles pour les enfants -c’est-à-dire que les allocations sociales et l’accès à l’éducation sont les mêmes pour chaque enfant, indépendamment de sa situation familiale- semblent connaître moins de pauvreté que les pays ayant ciblé leurs politiques sur certains groupes sociaux.
Toutefois, Hugh Frazer a décrit la pauvreté infantile comme un problème à multiples facettes qui nécessitait tout de même une combinaison de politiques universelles et ciblées.
Les pays européens inégaux face à la pauvreté des enfants
« Malgré la prospérité croissante, le fossé entre riches et pauvres dans les Etats-membres s’agrandit », juge Elizabeth Lynne, députée de l’Alliance des Démocrates et des Libéraux pour l'Europe. « Cela pose de sérieuses questions sur le genre d’Europe dans laquelle nous voulons vivre et sur l’engagement des Etats et des institutions européennes dans la lutte contre les inégalités », ajoute-t-elle.
Selon ses mots, certains pays abordent le problème de la pauvreté infantile de façon exemplaire : les autres pays devraient en tirer les leçons. Il devrait donc y avoir davantage d’échanges entre les partenaires européens : « ceci ne devrait pas uniquement être laissé aux Organisations Non-Gouvernementales », a-t-elle ajouté.
Au plan européen, la Commission de l'emploi au Parlement européen travaille actuellement sur une proposition visant à faire de 2010 l'année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Selon l’auteur du projet de rapport, la députée grecque Marie Panayotopoulos (Parti Populaire Européen-Démocrates Européens), « les préparatifs pour la célébration de l'Année 2010 comme Année de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale donnent un signal fort de la volonté des Etats membres de garantir à tous les enfants des conditions de vie dignes exemptes de pauvreté ou d'exclusion ». Parce que finalement, conclut-elle, « le combat contre la pauvreté contribue à la préservation de la paix et de la stabilité mondiale ». Les députés membres du Parlement européen voteront le 29 mai 2008 sur son rapport.
En savoir plus :
- Etude de la Commission européenne (en anglais) sur la pauvreté infantile dans l'UE
- Les documents disponibles lors de l'audition