1. L’Assemblée parlementaire constate que de nombreuses publicités présentent encore aujourd’hui une image de la femme en totale contradiction avec la réalité des rôles exercés par les femmes dans nos sociétés contemporaines.
2. Les publicités présentent trop souvent des images de femmes placées dans des situations humiliantes et dégradantes, voire même violentes et susceptibles de porter atteinte à la dignité humaine.
3. L’Assemblée s’indigne du fait que ce sont presque toujours les femmes qui sont réduites au travers de certaines publicités à de simples objets de consommation ou de désir sexuel.
4. Le respect de la dignité de la personne devrait pourtant être un objectif constamment recherché par les publicitaires.
5. L’Assemblée a conscience de l’ampleur de ce travail d’arriver à faire changer les mentalités et de casser des stéréotypes qui desservent les femmes dans leur lutte pour l’égalité. C’est pourquoi elle se donne comme objectif fondamental de permettre à toutes les femmes de voir enfin se refléter leur véritable image dans le monde où elles évoluent chaque jour.
6. Elle se félicite du fait que certains gouvernements, organisations non gouvernementales et organes gouvernementaux européens ont progressé sur la question de l’image des femmes dans les médias et la publicité. Des études ont été menées et des législations ont même été renforcées afin de lutter contre les discriminations entre femmes et hommes.
7. L’Assemblée déplore cependant la persistance des images et de la représentation négatives des femmes dans la publicité, ce qui est en partie dû au fait que la législation de nombreux Etats européens n’est pas suffisante, de même que les codes nationaux de déontologie applicables aux publicitaires ne sont pas respectés ou sont parfois même inexistants.
8. A cet égard, elle demande aux Etats membres du Conseil de l'Europe de prendre les mesures nécessaires pour faire respecter l'image - sous quelque forme que ce soit - digne et non discriminatoire de la femme, tout en s'appuyant sur le principe fondamental de la liberté d'expression qui ne saurait justifier aucune forme de censure.
9. Elle dénonce les ravages sur la santé notamment des jeunes filles, tels que l'anorexie, et, plus tard dans la vie, le développement d'autres maladies, telles que l'ostéoporose, ravages entraînés par certaines publicités qui présentent des femmes maigres que l'on fait passer pour des standards de beauté.
10. Elle rappelle l’importance de la déclaration et du programme d'action de la Quatrième conférence mondiale sur les femmes qui s'est tenue à Beijing en septembre 1995 qui recommande notamment aux médias et aux organismes de publicité « l’élaboration, dans le respect de la liberté d'expression, des principes et codes de conduite professionnels et d'autres formes d'auto réglementation afin d'encourager la présentation d'images non stéréotypées des femmes ».
11. S’appuyant sur la Convention du 18 décembre 1979 de l’Organisation des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, l’Assemblée souligne la nécessité de travailler sur trois axes, à savoir : la voie réglementaire, l’autorégulation et l’éducation à la publicité.
12. En conséquence, l’Assemblée recommande aux Etats membres du Conseil de l’Europe :
12.1. de ratifier le protocole facultatif à la convention de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, de faire une déclaration en vue d’accepter l’amendement à l’article 20 (1) de la convention, de rendre leur loi nationale compatible avec les dispositions de ces textes et de présenter périodiquement pour examen par le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, un rapport sur les mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre qu'ils ont adoptées pour donner effet aux dispositions de la Convention et sur les progrès réalisés à cet égard, s’ils ne l’ont pas encore fait ;
12.2. de mettre en œuvre le programme d’action de Pékin en ce qui concerne les femmes et les médias et à faire chaque année le bilan des avancées en la matière ;
12.3. de prendre les dispositions législatives internes adéquates de sorte :
12.3.1. à créer une infraction de provocation à la discrimination applicable à tout message publicitaire quel que soit le support de communication ;
12.3.2. à reconnaître aux associations de femmes la capacité d’agir en justice pour la défense de l’intérêt collectif, en l’occurrence la non-discrimination des femmes dans la publicité ;
12.4. d’encourager la mise en place de dispositifs nationaux d’autocontrôle et de veiller au renforcement des dispositifs d’autocontrôle mis en place par les instances nationales compétentes en matière de discipline de la publicité, par le biais des mesures suivantes :
12.4.1. modifier les codes d’éthique nationaux de manière à éviter la diffusion d’images ou de messages publicitaires qui pourraient être interprétés comme une incitation à la discrimination envers les femmes ou une atteinte à la dignité humaine ;
12.4.2. intégrer des représentants des consommateurs (femmes et hommes) dans les instances nationales compétentes en matière de discipline de la publicité ;
12.4.3. renforcer le caractère contraignant des décisions des institutions de régulation de la publicité ;
12.4.4. intégrer auprès des instances nationales compétentes en matière de discipline publicitaire un collège d’experts afin de mener une réflexion approfondie sur les mécanismes de la publicité ;
12.5. de prendre les mesures d’accompagnement suivantes visant à une éducation à la publicité :
12.5.1. la formation continue des professionnels de la publicité et la formation initiale dispensée dans les écoles de publicité, au respect de l’égalité entre les femmes et les hommes et plus largement à la non discrimination ;
12.5.2. la mise sur pied de programmes à destination du consommateur afin de l’aider à analyser l’impact des messages publicitaires ;
12.5.3. l’affectation de ressources suffisantes et la mise en œuvre dans les écoles de programmes éducatifs visant à apprendre aux enfants à faire la distinction entre la publicité contenue dans les annonces et la réalité ;
12.5.4. l’organisation dans la presse de campagnes de sensibilisation du citoyen aux publicités sexistes ou violentes et d’information du citoyen sur les moyens de réagir face à de telles publicités ;
12.5.5. assurer la mise à disposition du public d’un numéro de téléphone vert, d’une adresse électronique et d’une adresse postale, de manière à ce que chacun puisse dénoncer les publicités qui représentent des images de femmes portant atteinte à la dignité de la personne humaine ;
12.5.6. officialiser la remise d’un prix, par les publicitaires à leurs pairs ainsi que d’un prix du public, destinés à récompenser les publicités qui rompent le mieux avec les stéréotypes sexistes.