Destination préférée ? L’Espagne. Plus de 26 000 jeunes européens ont en effet choisi d’étudier dans une des universités de la péninsule ibérique durant l’année scolaire 2005-2006. Par ordre de préférence, viennent ensuite la France (plus de 21 000 étudiants), l’Allemagne (presque 18 000 étudiants) et la Grande-Bretagne (16 300 environ). Et vous, quel pays choisiriez-vous ?
Erasmus, l’exemple de l’humanisme
Le théologien et humaniste néerlandais Erasme (1465-1536) a donné son nom, cinq siècle plus tard, au programme européen de mobilité étudiante. Polyglotte, il se sentait chez lui partout, dans toute l’Europe, et il n’a pas hésité à traverser les frontières, étudiant en Angleterre, en France ou en Italie.
Comme lui, les étudiants Erasmus partent étudier, entre 3 et 12 mois, dans un autre pays de l’Union Européenne que le leur (quatre pays non-membres sont aussi inclus dans le programme : Norvège, Liechtenstein, Islande et Turquie). Ils reçoivent une bourse pour un cursus qui, de l’avis de la grande majorité des participants, demeure une expérience particulièrement enrichissante. Le député européen italien Giusto Catania (GUE-GVN) était étudiant Erasmus à Amsterdam en 1995 : « Je me rappelle de mon année Erasmus avec un grand enthousiasme ! J’y ai appris à quel point les échanges culturels sont fondamentaux : la culture et l’identité européenne doivent se confondre ».
Le programme Erasmus, lancé il y a vingt ans, n’a cessé de voir son budget augmenter, en partie pour tenir compte des élargissements successifs de l’UE (950 millions d’euros pour la période 2000-2006, et 3,114 milliards d’euros pour 2007-2013). Car l’objectif pour 2012 est ambitieux : à cette date, l’UE espère compter près de 3 millions d’anciens bénéficiaires du programme Erasmus en Europe...
Un peu de tolérance, avec votre adaptation culturelle ?
« Bien sûr j’ai amélioré mon allemand », explique le député européen britannique Alyn Smith (Verts/ALE), qui a étudié à Heidelberg en Allemagne. « Mais ce qui compte vraiment, avec Erasmus, c’est d’apprendre qu’on peut vivre dans un autre pays que le sien, dans une autre culture, et y être chaleureusement accueilli ».
Bien sûr, une année d’études Erasmus plonge les participants dans un nouvel environnement et une nouvelle langue : c’est pour beaucoup le premier grand saut dans l’inconnu, avec toutes les appréhensions que cela peut drainer. Pratique d’une langue étrangère, adaptation culturelle, confrontation avec la diversité et donc apprentissage de la tolérance : les enseignements d’une telle expérience sont nombreux !
Pour Saïd El Khadraoui, député européen belge (PSE), « en étant Erasmus, on est obligé d’apprendre à être autonomes, sans papa et maman. Surtout, on gagne en esprit d’ouverture : c’est en rencontrant des gens différents qu’on relativise et qu’on comprend mieux les différences. C’est très enrichissant ». Il avait passé un an à Paris, en 1997, et en a gardé des amitiés durables...
Erasmus, au-delà de l’enseignement...
Mais la richesse d’Erasmus n'est pas seulement…universitaire. Les « à-côtés » comptent tout autant : « Etudier c’est important, mais se mélanger à d’autres gens, d’autres pays, apprendre d’autres langues, passer du temps dans d’autres cultures, font tout aussi partie de l’expérience Erasmus », juge le député Alyn Smith.
Même son de cloche pour Giusto Catania, pour qui les échanges culturels peuvent s’opérer « en participant à des soirées multiculturelles », en « écoutant de la musique d’autres pays », ou même en « goûtant à la gastronomie de toute l’Europe ». « Une des caractéristiques fondamentales de la philosophie d’Erasmus, c’est justement la combinaison de toutes ces activités. Et cela doit être défendu », conclut-il.
Et après ? Erasmus et les opportunités d’emploi
Sur un Curriculum Vitae, une année d’études Erasmus est souvent considérée comme un atout pour les employeurs, comme l’explique le député Saïd El Khadraoui : « Les employeurs ne regardent pas seulement le diplôme, mais aussi la personnalité du candidat. Avoir été étudiant Erasmus démontre une aptitude à s’adapter, tout en connaissant plusieurs langues. C’est une expérience supplémentaire et donc un avantage par rapport à d’autres ».
Alyn Smith, lui, va plus loin : il dédie son parcours à son expérience Erasmus : « En fait, je peux dire avec certitude que je ne serais pas député européen si je n’avais pas eu l’expérience du programme Erasmus ».
Mais si Erasmus est une valeur ajoutée importante pour un CV, quelques voix s’élèvent pour dire que...tout le monde ne peut pas se l’offrir...
La barrière financière : Erasmus, un programme trop élitiste ?
La bourse moyenne d’un étudiant Erasmus s’élève à 150 euros par mois. C’est peu comparé au coût d'un séjour de plusieurs mois à l’étranger, pendant lesquels il faut se nourrir, se loger et vivre. Il a été question d’augmenter le montant de ces bourses : le Parlement s’est en effet battu pour qu’elles s’élèvent à 300 euros. Le compromis adopté avec les Etats-membres, pour 2007-2013, est de 200 euros par mois.
Selon une récente étude européenne (voir lien ci-dessous), de nombreux étudiants ne peuvent participer au programme Erasmus, en raison de difficultés financières. Le député Giusto Catania a économisé et donnée des cours pour compléter les 170 euros de bourse qu’il recevait : « 150 euros de moyenne, c’est largement insuffisant ! Il faut l’augmenter, à moins d’une sélection automatique des étudiants par l’argent. »
Dénonçant lui aussi le danger que seule une petite élite financière et intellectuelle bénéficie d’Erasmus, le député Saïd El Khadraoui propose d’autres pistes : « Il faut être créatif pour que tout le monde ait la chance de partir étudier à l’étranger : on pourrait par exemple combiner une bourse et un prêt social à taux zéro, qui serait remboursable dès le début de la vie active. »
Selon l’étude citée précédemment, une allocation plus nuancée des fonds, en fonction des pays d’origine et des pays d’accueil, pourrait aussi permettre à un plus grand nombre d’étudiants de participer au programme. Une manière de favoriser le mélange des cultures, dans une Europe qui tout en s’agrandissant, s’enrichit, mais doit aussi fournir plus d’efforts pour apprendre à se connaître.
En savoir plus :
- Etude (en anglais) sur le contexte socio-économique des étudiants Erasmus
- Qu'est-ce qu'Erasmus ? (site de la Commission européenne)
- Dossier sur Erasmus
- (En anglais seulement) : "MEPs adopt media and culture programmes"