Ref. :  000025837
Date :  2006-09-29
langue :  Français
Page d'accueil / Ensemble du site
fr / es / de / po / en

La dynamique européenne et mondiale de la diversité culturelle: un enjeu de la communication interculturelle

Ce texte est un papier préparé pour les Rencontres Interrégionales
« Régions et diversité culturelle : une dynamique européenne et mondiale »
(Lyon, les 28 et 29 septembre 2006)


Le monde devient de plus en plus interdépendant et des approches nouvelles et multiples de la diversité culturelle, visant à promouvoir les spécificités culturelles comme fondement de la communication interculturelle, sont en train de se développer rapidement. Les processus de mondialisation ont intensifié non seulement les échanges transnationaux de biens culturels, de produits des médias et de l'information, mais également les migrations humaines transnationales. Il suffit pour s'en convaincre de mentionner les données statistiques de l'Unesco, qui indiquent que 175 millions d'habitants de notre planète vivent dans un pays autre que celui où ils sont nés. Une personne sur dix, dans les régions développées du monde, est un migrant. De nouvelles formes de mobilité ont créé de nouvelles voies d'échanges, de rapprochement et de coopération, et développé de nouvelles expressions de la diversité culturelle.

C'est pourquoi les méthodologies des approches traditionnelles de la diversité culturelle se confrontent aux problèmes qu'apportent les changements et les nouveaux rapports transnationaux et transculturels dans le monde. Cela exige l'établissement de méthodologies innovatrices dans les approches de la diversité culturelle, liées avant tout à la communication interculturelle. En effet, il est aujourd'hui impossible de traiter de la dynamique européenne et mondiale de la diversité culturelle sans se référer à la communication et au dialogue interculturels. La reconnaissance des différences entre les cultures, de la diversité des cultures comme composante de leur identité et comme élément qui stimule la communication interculturelle, est un phénomène de notre temps. Les nouvelles approches de la diversité culturelle promeuvent les spécificités des expressions, des biens et des services culturels, en tant que fondement de la communication interculturelle. La gestion de la diversité culturelle se pose comme un impératif à la communauté mondiale et il n'est possible de la mettre en œuvre que par une communication interculturelle flexible et tolérante.

Une analyse des études préparées pour l'Unesco en 2006 démontre que la diversité culturelle est perçue de manière différente dans les diverses aires géographiques du monde.

L'étude qui se concentre sur l'Europe, analyse la place de la diversité culturelle dans les politiques culturelles. On souligne les nouveaux chemins d'approche de la diversité culturelle dans les politiques culturelles en Europe (par rapport aux définitions et approches conventionnelles des dichotomies majorité/minorité). Cette étude met d'abord en relief les liens entre la société civile, la diversité et les politiques culturelles, puis elle donne une analyse plus détaillée du soutien public à la créativité et se prononce pour l'approche d'une politique culturelle intégrée à la diversité culturelle. L'étude souligne les stratégies contemporaines qui visent à encourager l'utilisation du dialogue interculturel comme instrument de la politique culturelle pour promouvoir la diversité culturelle, et qui font ressortir le besoin d'un accès universel à la participation de tous dans la vie culturelle, comme consommateurs et comme créateurs (Mapping Approaches to Cultural Diversity in Cultural Policy Making in Europe, 2006, p. 62).

L'étude sur la diversité culturelle en Asie se concentre sur la diversité culturelle et des médias dans un certain nombre de pays asiatiques. Ce sont plutôt les «country profiles» de sept pays, mais, comme le souligne la conclusion, une éducation à la diversité culturelle est nécessaire à tous les niveaux, et doit tenir compte de deux éléments en particulier : a) des innovations technologiques et de la communication interculturelle, et b) de l'importance de la diaspora asiatique (Media and Cultural Diversity in Asia, 2006, p. 80).

L'étude sur l'Amérique du Nord explore un grand nombre de notions relevant de la diversité culturelle et de leur contexte, telles que : diversité démographique, diversité ethno-culturelle et de race, diversité dans l'éducation artistique, identité et diversité. Dans la partie consacrée aux notions socio-économiques de la diversité culturelle, Tyler Cowen offre une typologie de la diversité culturelle transnationale en soulignant qu'il faut s'interroger sur le type de diversité qu'apportent les processus de mondialisation (Notions of Cultural Diversity in North America, 2006, p. 8).

L'étude sur l'Afrique analyse l'évolution des concepts portant sur la diversité culturelle dans les politiques culturelles africaines, depuis le Pan African Cultural Manifesto (1969) jusqu'à la Charte pour la Renaissance culturelle en Afrique de 2006 (Review of the evolution of the concepts concerning Cultural Diversity in African Cultural Policies, 2006, p. 4-11).

L'analyse de la diversité culturelle dans le monde arabe met en relief les principaux axes d'identification de la diversité culturelle arabe (le rapport au sacré, la créativité comme expression même de la diversité, le rapport à l'Autre) et se prononce pour l'accès égal de tous à la culture riche et diverse du monde arabe (Cultural Diversity in the Arab World, 2006, p. 27).

Dans l'étude sur l'Amérique latine, la diversité culturelle est comprise comme diversité ethnique et religieuse. Une partie importante de l'étude est consacrée à la diversité et à l'éducation interculturelle, ainsi qu'aux industries culturelles, diversité et pluralisme dans les processus de la mondialisation et de l'hybridation des cultures. L'étude met également en relief le rôle des politiques culturelles, nationales et internationales, dans la protection et la promotion de la diversité culturelle (Diversidad cultural en America latina y el Caribe, 2006, p. 109).

Les approches de la diversité culturelle et les concepts qui en relèvent sont encore relativement statiques et uni-dimensionnels (par exemple, ensemble de traditions, d'artisanats, de pratiques culturelles, etc.), ce que reflètent, d'une certaine manière, les études mentionnées. Pourtant, il en découle aussi la prise de conscience de la nécessité de mettre en place des approches innovatrices de la diversité culturelle, tant dans les politiques culturelles que dans la communication interculturelle dont la diversité représente le fondement. Il s'agit d'un processus de déconstruction et de 'refocusing' des politiques culturelles.

Bien que toutes ces études reconnaissent la diversité des cultures comme facteur de l'interaction entre ces dernières, il est nécessaire de rappeler ici qu'une partie du monde compte, avec ses biens et services culturels, pour à peine 1% de l'échange international. L'absence de la majorité des pays en développement et des pays en transition dans l'échange international des biens culturels démontre de manière évidente la raison pour laquelle nous avons besoin de mettre en pratique ('Making It Work!') la Convention sur la Protection et la Promotion de la Diversité des Expressions Culturelles, adoptée par l'Unesco en 2005. Dans une récente étude de la Commission européenne, on souligne que la mondialisation doit fonctionner pour toutes les cultures ('Globalisation must work for all cultures') : « La promotion de l'échange culturel et de la diversité évite l'homogénéisation culturelle » (L'économie de la culture en Europe, 2006, p. 217). Qu'en est-il dans la réalité? Il suffit de mentionner que le marché américain est le plus vaste dans le monde, mais en même temps le plus difficile à pénétrer pour les produits et les services non-américains, à cause de ses barrières structurelles. Par exemple, les films européens, africains et asiatiques représentent moins de 5% du marché américain. Dans d'autres domaines, ceux de la musique ou de l' audiovisuel par exemple, la situation est semblable. Une étude de l'Institut statistique de l'Unesco à Montréal démontre que plus de soixante-dix pour cent de l'échange international des biens culturels revient à trois pays dans le monde.

La communication interculturelle est étroitement liée aux réseaux culturels. Ces derniers jouent un rôle décisif au niveau international dans la promotion de la diversité culturelle. L'ensemble des rapports internationaux est aujourd'hui marqué par l'activité des réseaux, qui sont en partie matériels et en partie virtuels, mais toujours 'nomades' et transculturels. La nature même des réseaux est de témoigner du pluralisme culturel en tant que chance pour l'interaction, par laquelle toutes les cultures expriment leur diversité mais aussi leur tolérance envers d'autres cultures. Au moyen des réseaux, les différentes sociétés et différents systèmes de production peuvent s'insérer dans la communication en affirmant leurs spécificités.

La mise en réseaux des cultures suscite une nouvelle dynamique de la diversité culturelle, au niveau tant européen que mondial. Au fond, notre monde globalisé peut être perçu comme un réseau de diverses cultures qui éprouvent un besoin permanent d'entretenir des relations interactives pour pouvoir exister et développer des valeurs, des créations et des pratiques nouvelles. Par leur ouverture, leur caractère non-hiérarchique et horizontal, ainsi que par leur flexibilité, les réseaux stimulent l'échange de valeurs culturelles diverses, affirment la diversité culturelle et facilitent le dialogue interculturel. D'autre part, les principes de la diversité exercent une influence importante sur les missions opératives des réseaux culturels. Les efforts des réseaux se concentrent sur des entreprises communes, depuis les projets de recherche (politiques culturelles, développement culturel) jusqu'à la mobilité des artistes.
Enfin, c'est aux réseaux qu'on doit le processus de revalorisation des cultures qui a débuté dans les années 1990: ce sont eux qui ont stimulé cette revalorisation (étant donné, surtout, l'influence des nouvelles technologies sur la culture, la transformation des politiques culturelles, le développement de la culture numérique, le renforcement du rôle de la coopération culturelle internationale, etc.). C'est pourquoi il faut concevoir les réseaux non pas comme un « secteur de services », mais comme l'expression authentique des changements culturels.

En effet, il serait difficile de parler de la diversité culturelle sans aborder la question de la culture numérique. Comment les nouvelles technologies, et plus spécialement l'Internet, ouvrent-elles de nouvelles voies de communication ? Comment promeuvent-elles des formes spécifiques de créativité ? Quelle est leur influence sur la dynamique de la diversité culturelle, la culture numérique ne transformant pas seulement notre monde, mais aussi la manière dont nous comprenons ce monde ? Les innovations technologiques réduisent les vieilles barrières et les difficultés qui surgissent dans la communication, en premier lieu celles liées à l'espace et au temps, permettant aux personnes d'adopter de nouvelles formes d'interaction et de participation. Le scepticisme de Castells, lorsqu'il estime que les nouvelles technologies vont pour longtemps exclure de la communication une grande partie de l'humanité, est discutable, car même les régions du monde les moins développées montrent des progrès dans l'utilisation de ces technologies. Ainsi, par exemple, les données récentes de la Banque mondiale montrent que le continent africain réussit à élargir son accès à l'Internet, et cela signifie que l'Internet devient, malgré tous les obstacles, une source globale accessible à un public de plus en plus vaste.

La culture numérique change le champ de la culture, elle tend vers de nouvelles formes d'expression créative, et offre une nouvelle perspective à la communication culturelle internationale. Il faudrait donc identifier tout un bloc de questions embrassant la culture numérique et ses effets sur la diversité culturelle, c'est-à-dire toute une série de phénomènes nouveaux qui représentent un vrai défi pour la diversité culturelle et la communication interculturelle.

Quand on analyse la communication interculturelle, on pense à la coopération interrégionale. Les régions s'affirment par leurs spécificités et créations culturelles, mais cette affirmation dépend des modes de communication interrégionale et des efforts faits pour promouvoir les diversités culturelles. Diversité et communication sont indissociables tant au niveau régional qu'au niveau international et les quatre régions partenaires, Quatre Moteurs pour l'Europe, qui représentent un exemple fascinant de coopération interrégionale, sont également le lieu d'un rapprochement et d'une communication dynamique au cœur desquels la culture s'inscrit dans toutes ses expressions riches et diverses.

Bibliographie:

- Castells, Manuel, The Information Age: Economy, Society and Culture, Vol. I - The Rise of the Network Society, Blackwell, London, 1996.
- Cowen, Tyler, Creative Destruction: How Globalization is Changing the World's Cultures, Princeton University Press, Princeton, 2002.
- Cultural Diversity in the Arab World, Final Report, The Middle East Center for Culture and Development, 2006.
- Diversidad cultural en America latina y el Caribe, OEI-Unesco, 2006.
- Echanges internationaux d'une selection de biens et services culturels, 1994-2003, Institut de statistique de l'Unesco, Montréal, 2005.
- L'économie de la culture en Europe, EC, 2006.
- Mapping Approaches to Cultural Diversity in Cultural Policy Making in Europe, A Background Report to Unesco, ERICarts, 2006.
- Media and Cultural Diversity in Asia, A Report Prepared for Unesco, AMIC, 2006.
Notions of Cultural Diversity in North America, Draft Report of the North American consultation, 2006.
- Review of the evolution of the concepts concerning Cultural Diversity in African Cultural Policies, Observatory of Cultural Policies in Africa, 2006.
- UNESCO's Convention on the Protection and Promotion of the Diversity of Cultural Expressions: Making It Work, edited by Nina Obuljen and Joost Smiers, Culturelink/IMO, 2006.


Notez ce document
 
 
 
Moyenne des 71 opinions 
Note 2.49 / 4 MoyenMoyenMoyenMoyen
RECHERCHE
Mots-clés   go
dans 
Traduire cette page Traduire par Google Translate
Partager

Share on Facebook
FACEBOOK
Partager sur Twitter
TWITTER
Share on Google+Google + Share on LinkedInLinkedIn
Partager sur MessengerMessenger Partager sur BloggerBlogger