1. Quelle est la portée du texte adopté par l’UNESCO?
La Convention de l’UNESCO consacre des règles, principes et référents communs en matière de diversité culturelle au niveau mondial. C’est la première fois qu’un tel consensus a pu être trouvé sur ces questions par la communauté internationale.
Ce texte contribue notamment à reconnaître le rôle et la légitimité des politiques publiques dans la protection et la promotion de la diversité culturelle, à reconnaître l'importance de la coopération internationale et la promouvoir pour faire face aux situations de vulnérabilités culturelles, notamment vis-à-vis des pays en développement, et à définir une articulation adéquate avec les autres instruments internationaux qui permette la mise en œuvre effective de la Convention.
La Convention représente par ailleurs une nouvelle plateforme pour aborder la culture dans le contexte plus large du développement durable.
2. Union européenne et diversité culturelle : comment la Communauté défend-t-elle le principe de la diversité culturelle ?
La préservation et la promotion de la diversité culturelle figurent au titre des principes fondateurs de la Communauté. Ils sont inscrits au Traité, à l’article 151 et dans la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union européenne, à l’article 22.3.
Au sein de l’Union, l’article 151 du Traité, qui a permis le développement d’actions culturelles, notamment à travers le Programme Culture 2000, exige en outre la prise en compte de la dimension culturelle dans les autres politiques communautaires, par exemple dans la politique industrielle dans le cas du Programme MEDIA Plus et dans le marché intérieur (libre circulation des services) pour ce qui est de la Directive « Télévision sans Frontières ».
Ce principe est également pertinent au regard de la dimension extérieure de l’action communautaire, et l’article 151 requiert de la CE et de ses Etats membres la promotion de ce modèle dans leurs relations internationales, à titre de contribution à un ordre mondial fondé sur le développement durable, la coexistence pacifique et le dialogue entre les cultures.
La Communauté a ainsi élaboré une politique de développement ambitieuse qui comprend une composante culturelle avec certaines régions du monde, en particulier la région Afrique Caraïbes Pacifique (ACP), ainsi que la Méditerranée et, plus généralement, le voisinage de l’Union. Dans ce cadre, les politiques de la Communauté soutiennent et mettent en œuvre certains objectifs spécifiques consacrés dans la Convention adoptée, tels que le développement d’industries culturelles locales viables et l’amélioration de la circulation des œuvres culturelles au niveau global, en particulier en provenance des pays en développement.
3. Qui a négocié cette Convention au nom de l’Union européenne?
La Communauté européenne, par la voix de la Commission européenne et en vertu du mandat que lui a conféré le Conseil en novembre 2004, a négocié aux côtés des Etats Membres à l’UNESCO, dont la voix était portée par la Présidence du Conseil en exercice (trois présidences successives : Pays-Bas, Luxembourg et Royaume-Uni) tout au long du processus. Il s’agit du modus operandi classique à chaque fois que les compétences en jeu dans une négociation internationale sont partagées entre la Communauté et ses Etats membres. Les positions communes exprimées par la Commission ou par la Présidence, selon les matières, ont été intégralement coordonnées tout au long des négociations.
Il s’agissait d’une première pour la Communauté européenne, car jamais auparavant elle n’avait pris part à une négociation sur un texte normatif à l’UNESCO.
Parlant donc d’une seule voix, l’Union européenne a pu pour la première fois agir en tant qu’acteur majeur de la négociation au sein de l’UNESCO.
Le Parlement européen, et en particulier sa Commission “Culture”, a suivi avec attention ces négociations et a soutenu la démarche Communautaire tout au long du processus.
4. Quid du processus de ratification, notamment des Etats membres et de la Communauté?
A ce jour, 22 pays tiers[1] ont ratifié ce texte, dont un pays à l'accession – la Roumanie – et un pays candidat – la Croatie.
S'agissant d'une Convention faisant intervenir des compétences partagées de la Communauté et des Etats membres, la ratification doit intervenir à ces deux niveaux.
La Communauté a entamé son processus de ratification dès l'année 2005, et le Conseil a adopté le 18 mai dernier une décision l'autorisant à ratifier la Convention.
Les Etats membres ont entamé leur processus également au lendemain de l'adoption, et au cours de l'année 2006, et le 18 décembre, la Communauté et 12 Etats membres ont ratifié la Convention: Autriche, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Lituanie, Luxembourg, Malte, Slovaquie, Slovénie, et Suède.
La Bulgarie a également ratifié hier à Paris, à la suite de cette ratification conjointe.
Les autres Etats membres, dont les processus d'adoption des instruments de ratification sont en cours au niveau national, ratifieront par la suite individuellement auprès de l'UNESCO.
30 ratifications sont nécessaires pour permettre l'entrée en vigueur de la Convention
Grâce à la ratification de la Communauté et des Etats membres, la Convention entrera en vigueur dans trois mois, comme prévu dans le dispositif.
5. En quoi ce texte constitue-t-il un nouveau pilier de la gouvernance mondiale ?
La Convention de l’UNESCO permet de combler un vide juridique dans la gouvernance mondiale en établissant une série de droits et obligations, tant au niveau national qu'international, visant à la protection et la promotion de la diversité culturelle. Cet instrument jouera pour la diversité culturelle un rôle comparable - et au même niveau normatif - que – dans leurs domaines respectifs - les conventions de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, les accords de l'Organisation Mondiale du Commerce, ceux de l'Organisation Mondiale de la Santé et les Accords Multilatéraux sur l'Environnement.
La Convention de l’UNESCO constitue une plateforme de débats et d’échanges sur la diversité culturelle au niveau international : elle permettra une observation et un suivi précis de la réalité de la diversité culturelle dans le monde, ainsi que des échanges de vues, d’information et de bonnes pratiques entre les Parties. Cette Convention sera également le lieu d’une coordination et d’une concertation des Parties pour la promotion des objectifs de la Convention dans les autres enceintes internationales ainsi que pour le renforcement de la coopération internationale.
L'objectif général de la Convention est la prise en compte de la diversité culturelle lors du développement d'autres politiques, tout en assurant que les politiques culturelles soutiennent l'accès équitable à la fois aux cultures locales et aux autres cultures du monde. De cette manière, la Convention de l’UNESCO est, du point de vue de la Commission, une transposition au niveau international des principes communautaires et en particulier de l’article 151.4, qui prévoit que la Communauté tient compte des aspects culturels au titre d’autres dispositions du traité.
6. Cette Convention remet-elle en cause les engagements de la Communauté et de ses Etats Membres à l’Organisation mondiale du Commerce ? Quelle est l’interaction de ce texte avec les engagements à l’OMC ?
La Convention ne remet pas en cause les engagements à l’OMC. Il n'y a aucun objectif ou effet d’extraire ou d’exclure les biens et les services culturels des accords de l'OMC. La Convention reconnaît la spécificité des biens et des services culturels et légitime les politiques culturelles internes et internationales.
Cette Convention n’est pas subordonnée à d'autres traités, mais bien sur un pied d'égalité avec, par exemple, les accords de l'OMC. Elle n’est pas en conflit mais au contraire complémentaire par rapport à ces autres accords internationaux.
La Convention de l'UNESCO ne modifie pas des accords de l'OMC (ce qu’elle ne pourrait pas faire d’ailleurs - seuls les membres de l'organisation le pouvant, dans le cadre des procédures prévues) mais elle oblige des parties à prendre en considération les objectifs de diversité culturelle et les dispositions de la convention, lors de l'application et de l'interprétation de leurs obligations commerciales, ainsi que de la négociation de leurs engagements commerciaux. Ainsi, la Convention représente un pas en avant considérable pour la protection et la promotion de la diversité culturelle au niveau international, y compris dans les négociations commerciales.
Rien dans la Convention ne préjuge des positions que prendront les Parties dans les enceintes commerciales. Pour sa part, la Communauté et ses Etats Membres ont une position claire à l’OMC sur les services culturels et audiovisuels, consistant à préserver leur capacité de maintenir et développer des politiques dans ces domaines. Dans le cadre du cycle de négociations de Doha, la Commission a ainsi indiqué qu’elle ne présenterait aucune demande ni offre d’engagement commercial sur les services audiovisuels et culturels.
Pour plus d'information :
http://europa.eu.int/comm/culture/portal/action/diversity/unesco_fr.htm
[1] Canada, Maurice, Mexique, Roumanie, Monaco, Bolivie, Djibouti, Croatie, Togo, Belarus, Madagascar, Burkina Faso, Moldavie, Perou, Guatemala, Sénégal, Equateur, Mali, Albanie, Cameroun, Namibie et Inde.
MEMO/06/500