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Date :  2006-02-08
langue :  Français
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Diversité culturelle et mondialisations : - en bref, quels liens ?

Source :  Astrid Rostaing


Quels liens entre la problématique contemporaine de la diversité culturelle et celle des mondialisations en cours ?

La notion de «diversité culturelle» peut, tout d’abord, être perçue comme une réponse à la globalisation économique, comme un moyen d’élaborer un coup d’arrêt à la libéralisation sans frein. Elle défend, en ce sens, l’idée que la communauté internationale doit autant, voire même plus, préserver les différentes cultures du monde qu’elle ne le fait pour l’économie libérale. Les enjeux de la diversité culturelle sont, en effet, de promouvoir les traditions ethniques et les langues minoritaires, de protéger les cultures locales des impacts négatifs liés à l’homogénéisation ou à l’uniformisation des cultures au profit des modèles culturels dominants, fondées sur une logique marchande qui exclut l’expression des cultures «moins rentables». De là découle la volonté de donner naissance à un organe de protection et de promotion de la diversité culturelle, et ce dans l’optique d’en faire un instrument juridique contraignant spécifique à la culture ; un instrument juridique qui soit aussi compétent que l’Organisation Mondiale du Commerce, et qui construise un humanisme du divers.

C’est là qu’un premier lien semble se tisser avec la problématique contemporaine des mondialisations en cours. En effet, si celles-ci ne peuvent être réduites à une dénomination au singulier et une définition unique, elles possèdent néanmoins un projet commun : celui de trouver un moyen de joindre les États du monde, de se doter d’une organisation de gestion et de gouvernance ; celui d’avoir la possibilité de concevoir une politique à l’échelle du monde. Les mondialisations peuvent être considérées comme représentant toutes les tentatives de l’histoire ancienne et actuelle d’affirmer le monde. Il s’agit là de l’histoire des faits, des idées, ou encore des rapports de force. En outre, il est important de souligner qu’il y a des mondialisations, certaines étant souhaitables, d’autres non. Là réside le débat. Ce que l’on constate, toutefois, est que la société civile et la communauté internationale, dans leur grande majorité, pensent le phénomène de mondialisations uniquement en termes économiques et technologiques ; d’où l’appellation «la mondialisation» qui recentrerait, semble-t-il de façon pratique, le phénomène dans des qualifications précises. Le commerce, la haute technologie, l’économique sont, en effet, des points importants mais ce sont loin d’être les seuls.

Il s’agit pour les deux notions, «diversité culturelle» et «mondialisations», dans leur «bonne» adaptation, de tenter d’aboutir à une union d’entités qui diffèrent entre elles, et de trouver le meilleur moyen de lier ces entités de façon légitime, de les représenter et de les comprendre de manière équitable et efficace. Pourtant, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur ce que peut être une «bonne» diversité culturelle et ce que sont les mondialisations favorables ? Par ailleurs, le monde, les questions sur l’harmonie du monde sont une affaire collective. Mais qu’est-ce qu’un monde ? Aucune qualification n’est et ne sera satisfaisante pour la totalité des hommes. On ne peut, en outre, parler de «nature» propre du monde. Le développement de l’idée même de monde vient du dépassement de sa vision naturaliste. La notion de culture fait, elle aussi, l’objet de discussions incessantes. Une vision de la culture, telle qu’elle est perçue aujourd’hui, considère notamment que l’on surestime totalement la portée des phénomènes culturels.

Les deux notions se rapportent à une volonté, à un projet cosmopolitique de gérer une politique à l’échelle du monde, de s’emparer des problèmes du monde, et ainsi de définir une commune mesure. Mais comment créer un tel système ? Faut-il se doter d’un organe de gestion et pourquoi ? À quelles conditions la notion de gouvernance est-elle soutenable et légitime ? Faudrait-il une gouvernance de la gouvernance ? Une communauté culturelle sur la communauté culturelle ? La diversité culturelle pourrait être, à cet égard, considérée comme le pendant ou un des versants de la problématique des mondialisations.

Les deux notions représentent, par conséquent, toutes deux des processus dynamiques sans cesse évoluant, changeant, et étant menacés et sujets à d’infinies interrogations. Néanmoins, ce qu’il apparaît nécessaire de retenir c’est qu’aujourd’hui, on ne peut penser les problèmes à l’échelle strictement locale, régionale ou nationale. En outre, si on ne peut être contre la diversité culturelle, on ne peut non plus échapper à une appréhension des problématiques contemporaines à l’échelle mondiale. Ce serait alors se voiler la face et demeurer inconscient de toute réalité du monde.


Comment peut-on penser ces liens et quel en est l'intérêt ?

Il est tout d’abord nécessaire de sortir des concepts simples de «diversité culturelle», notamment de celui selon lequel, la diversité culturelle représenterait la culture des mondes exotiques et éloignés de «notre monde occidental» (telle la dénomination réductrice de «musiques du monde»). De même pour la définition simpliste de la mondialisation comme représentante du phénomène des nouvelles technologies et de la logique du tout marché. Ainsi est-il indispensable de repenser sans cesse les termes que l’on emploie, de les réévaluer en permanence, voire même d’en choisir d’autres. Par ailleurs, la résolution de la problématique de la diversité culturelle et de celle des mondialisations n’apparaît pas comme pouvant avoir lieu à l’intérieur, ou par l’intermédiaire des États. En effet, les relations interétatiques, intergouvernementales ou internationales n’ont su jusqu’à présent régler de façon efficace toutes les divergences culturelles et politiques. Se pose alors la question de savoir comment il faut s’y prendre. Par le multilatéralisme, la création d’un organe tel les Nations Unies ? Par l’autorégulation (sui generis), c’est-à-dire par le fait que la gouvernance se génère elle-même à travers les États ? Ou bien encore par des règles spécifiquement adaptées au cadre présent, à l’ultra contemporanéité de la «diversité culturelle» et des «mondialisations» ?

Néanmoins, comment penser les liens entre ces deux notions sinon hors du monde, sinon hors de l’humain ? Cette idée de régence mondiale invite en effet la peur, le doute mais aussi le retrait et la réclusion sur soi. Ainsi, comment pouvoir penser à ces liens sans une certaine ironie, sans un détachement propre à la glose et son irrésolution ? Comment peut-on faire pour penser cela ? Où être pour cela, fermer les yeux sur quoi, à quoi ne plus penser pour ne pas influer cette réflexion ? «J’ignore comment on peut penser ces liens à partir du moment où, puisqu’il n’y a pas de réponse concrète possible à l’analyse, je ne considère pas l’intérêt que cela peut avoir». On observe en effet une difficulté à penser le sens de l’histoire des hommes, encore plus de le régir sinon l’orienter alors que l’observateur lui-même en fait partie, y participe, positionné de fait dans le contexte du monde, et emporté dans la foule et son débit. Pourtant, l’on constate une urgence liée à cette idée de régulation, de gouvernance générale quasiment déifiée, face à un monde économique (mais pas seulement) dominé par l’idée de capacité de production et par un débit d’informations et d’éléments historiques. C’est ainsi que l’intérêt de penser les liens est maintenant à définir. L’intérêt du fait de penser les liens entre «diversité culturelle» et «mondialisations» réside dans la compréhension de notre état en cours, du «dasein» mis en mouvement face à un géant qui se lève.

Et ainsi l’on peut constater qu’il est essentiel de marquer des étapes, de faire des avancées dans ce monde, même s’il y existe encore et toujours des menaces, des difficultés, des conflits, et des inégalités. Pour ce faire, il apparaît indispensable de privilégier le dialogue social, d’éduquer les personnes pour apprendre à vivre ensemble, à connaître l’autre. Être sensible à la différence mais aussi à l’aptitude de se réunir. Former un imaginaire pour apprendre à penser la relation avec autrui. Recouvrer la notion de peuple qui a disparu notamment avec l’individualisme, à savoir le refus, et l’ignorance de l’autre.


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