Ref. :  000000215
Date :  2001-01-30
langue :  Français
Page d'accueil / Ensemble du site
fr / es / de / po / en

Pauvretés (nouvelles ----, nouvelles solidarités)

Pauvretés

Source :  Mauricio Langon


Le 1er Forum Social Mondial (rencontre des « pauvres ») qui se réunit à Porto Alegre, examine la « richesse mondiale». Discute « la production de richesse et la reproduction sociale », ainsi que « l’accès aux richesses et la soutenabilité de la croissance » sur la base de questions de type instrumental, qui supposent un accord sur les fins que l’on poursuit et qui projettent les problèmes sur un plan technique.

Le paradoxe que les pauvres s’occupent de la richesse tandis que les riches se préoccupent de la pauvreté en même temps que les deux s’accordent à formuler la question en des termes techniques, donne leur origine à ces réflexions éthico-politiques centrées sur la relation « pauvreté/richesse » dans son rapport avec la question non technique de la « solidarité ».

Substantiver « la pauvreté », la traiter comme s’il s’agissait d’une « chose » et non d’une « relation », faire abstraction des conditions historiques, sociales culturelles et subjectives dans lesquelles elle apparaît, la quantifier et la mesurer, la réduire à des carences ou des attributs des individus, la présenter comme un sous-produit « naturel » de la réalité sociale ont été quelques-uns des modes de consolidation et d’aggravation d’une situation mondiale caractérisée par la fracture entre la concentration des richesses en peu de mains et l’exclusion de la majorité de l’humanité de la possibilité de développer une vie humaine. Ils ont été aussi des modes de destruction de la solidarité humaine.

L’idée de maintenir sous tutelle les sujets « sous-développés » sous prétexte que par eux-mêmes ils seraient incapables de développer une vie humaine, fut assumée et approfondie par des institutions internationales (spécialement de type financier, comme la Banque Mondiale et le FMI) hégémonisés par les bénéficiaires du système (ceux qui, par exemple se réunissent à Davos). Des intellectuels liés à ces organismes sont devenus les organisateurs de stratégies dont l’objectif invoqué était d’éradiquer la pauvreté, mais qui sont en réalité orientées pour la contrôler de manière à ne pas déstabiliser le système.

La « pauvreté » fonctionne comme une notion homogénéisante, quantitative et simplificatrice des aspects négatifs de la réalité sociale actuelle, que consolide la notion de globalisation liée au marché. La pauvreté apparaît comme un effet attribuable à ses propres victimes ou à l’inefficience des gouvernements qui n’ont pas appliqué avec succès les recettes globalisées.

Définir la pauvreté comme la plus grande négativité humaine, dans sa frontière avec la mort ou avec l’inhumain est aussi une façon de briser la solidarité. La solidarité entre les différents « pauvres » se brise en proposant à chaque pauvre comme seul modèle humain celui « des riches ». Les politiques sociales d’inspiration solidaire tendent à se focaliser sur quelques secteurs sociaux qui, par là même, se retrouvent isolés, à la fois parce que les dites politiques perdent leur caractère propre, pour se transformer en politiques pauvres pour les pauvres, comme c’est notamment le cas de l’éducation.

Mais la pauvreté éclate aussi en de multiples « pauvretés ». D’un côté, aujourd’hui, il est possible d’être pauvre à un moment, et de ne plus l’être à un autre. En même temps il est toujours plus clair que la pauvreté est structurelle, croissante, et impossible à réduire dans le système actuel. D’un autre côté, les caractéristiques « idéales » du pauvre actuel (non producteur, non propriétaire, non consommateur, non contractant) le mettent en dehors du système capitaliste, ce qui peut l’amener à retrouver ses traditions et se mettre en solidarité avec d’autres.

Cette fragmentation en « nouvelles pauvretés » doit être repensée en solidarité. Je ne crois pas que cela a du sens de parler de « solidarités ». La solidarité suppose d’être « un seul » avec d’autres et correspond à l’idée de construire une unité plus vaste, une « solidarité » de « destin ».
Il s’agit alors de redécouvrir et de reconstruire l’unité par la solidarité humaine qui exige le changement d’un système inhumain. Et de la construire en reconstruisant la diversité des sujets – et ce depuis les plus petits faits, depuis chaque façon d'être homme, depuis chaque mode de pauvreté.



(Sur la même problématique ou des thèmes connexes, nous recommandons l'article suivant en espagnol du même auteur : Pobreza Humana y Educación)


Notez ce document
 
 
 
Moyenne des 44 opinions 
Note 2.77 / 4 MoyenMoyenMoyenMoyen
RECHERCHE
Mots-clés   go
dans 
Traduire cette page Traduire par Google Translate
Partager

Share on Facebook
FACEBOOK
Partager sur Twitter
TWITTER
Share on Google+Google + Share on LinkedInLinkedIn
Partager sur MessengerMessenger Partager sur BloggerBlogger
Autres rubriques
où trouver cet article :