1. C’est avec plaisir que nous avons accueilli l’initiative de l’OCDE de réunir à Paris les représentants de trente pays Membres de l’OCDE, du Brésil, de la Chine, de l’Inde et de l’Afrique du Sud en dehors d’un contexte de négociation. La réunion a permis d’améliorer notre compréhension commune de la portée mondiale de la réforme des politiques agricoles, grâce aux discussions animées tenues lors de deux sessions, l’une consacrée à la poursuite des objectifs de politique interne et l’autre examinant comment faciliter les échanges.
Réaliser les objectifs de politique interne….
2. Les conditions dans lesquelles opère le secteur agricole diffèrent largement d’un pays à l’autre, mais nos sociétés partagent bon nombre d’intérêts et d’attentes semblables. Dans tous nos pays, les priorités en matière de politiques pour le secteur agroalimentaire ont beaucoup évolué au fil des années et de nouveaux changements sont à prévoir.
3. Considérant tout d’abord le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Afrique du Sud, au cours des quinze dernières années environ, des réformes politiques et économiques fondamentales ont été engagées, avec de larges incidences sur le secteur agricole. Des progrès considérables ont été réalisés, notamment en termes de réduction de la pauvreté, démontrant ainsi que l’agriculture peut contribuer au développement économique durable et à la réduction de la pauvreté.
4. Dans les pays de l’OCDE, les politiques ont également évolué, mais les changements ont été lents. L’accent a été mis de façon croissante sur les questions touchant à la demande, au fur et à mesure de l’évolution sensible des préoccupations des consommateurs - de l’accès à une nourriture en quantité suffisante, à la façon dont les aliments sont produits, à leur sécurité et à leurs caractéristiques de qualité. Dans le même temps, les contributions que l’agriculture peut apporter au-delà de la production d’aliments et de fibres ont été plus largement reconnues. Celles-ci incluent entre autres, la gestion des paysages et de la nature, la biodiversité, les aménités rurales et le bien-être des communautés rurales.
5. Dans tous les pays, l’accent est mis sur la réduction des incidences négatives de l’agriculture sur l’environnement et sur l’urgence qu’il convient d’attacher à la mise en place de mesures effectives pour faire face à la rareté croissante de l’eau et des terres productives, dans un monde où la demande de produits alimentaires va croissant et où l’utilisation des produits agricoles à des fins diverses non alimentaires, y compris en tant que ressources d'énergie renouvelable, pourrait également augmenter. Assurer un développement économique équilibré entre les zones rurales et les zones urbaines et entre les secteurs économiques à l’intérieur des zones rurales, fait également l’objet d’attention. L’agriculture et les zones rurales bénéficieraient grandement d’une amélioration des opportunités de revenus non agricoles. Améliorer les infrastructures et encourager l’innovation s’agissant de la technologie et des connaissances, demeurent des priorités importantes.
6. Nous sommes tous confrontés au défi qui consiste à ajuster nos politiques à l’évolution des priorités et à viser la mise en place de politiques équilibrées qui soient à la fois effectives, efficaces et équitables. Il est de plus en plus nécessaire de découpler le soutien de la production et des prix et d’évoluer vers une approche intégrée de l’exploitation agricole, permettant aux marchés d’orienter les décisions de production dans le secteur agricole. L’allègement de la charge réglementaire et administrative qui pèse sur le secteur agro-alimentaire peut jouer un rôle important dans l’amélioration de l’efficacité de ce secteur. Nous reconnaissons que les politiques qui ciblent directement des objectifs spécifiques, telles que celles visant à aider les exploitants à gérer les risques, à contribuer à la viabilité des communautés rurales et à améliorer la performance environnementale, peuvent parvenir à de meilleurs résultats que des mesures de soutien général fondées sur la production agricole et les prix.
7. Nous avons pris note du fait que pour de nombreux pays, le renforcement de la capacité des exploitants à soutenir la concurrence dans une économie de plus en plus mondialisée, constitue un objectif majeur. En tentant de réaliser cet objectif partagé, chaque pays devra mettre l’accent sur les avantages particuliers de son secteur agricole et alimentaire.
Tout en facilitant le commerce agricole…..
8. Nous avons examiné dans quelle mesure les politiques poursuivies dans d’autres pays affectent notre capacité à réaliser nos propres objectifs. Nous notons que ceci revêt une importance particulière pour les pays dans lesquels la production agricole et les échanges jouent un rôle important dans l’économie globale. Dans la mesure où, dans le monde, une vaste majorité de la population pauvre vit dans les zones rurales, améliorer les conditions dans lesquelles opère l’agriculture au plan mondial, peut contribuer de façon majeure à la réalisation de l’objectif visant l’éradication de l’extrême pauvreté et de la faim. Dans le même temps nous notons que la plupart des gains liés à l’ouverture des marchés proviendront de la réforme unilatérale des politiques.
9. Nous avons souligné le droit souverain de toutes les nations à poursuivre leurs objectifs de politique interne dans les domaines alimentaire et agricole, tout en reconnaissant également qu’il incombe à tous les pays d’adopter des politiques limitant toute retombée négative au plan international. Nous avons considéré les résultats des analyses de l’OCDE faisant valoir que les politiques les plus performantes sur le plan interne sont celles qui ont tendance à créer le moins de distorsions des échanges. L’ouverture des marchés et la réduction des subventions créant des distorsions des échanges dans le cadre du processus multilatéral de libéralisation des échanges ne met donc pas en cause la capacité des pays à poursuivre leurs objectifs de politique interne s’agissant de l’agriculture.
10. Dans ce contexte, nous avons examiné les incidences commerciales de différentes politiques agricoles. Il est largement reconnu que le découplage du soutien agricole de la production peut améliorer considérablement les conditions du commerce international, mais le niveau et la durée du soutien demeurent sujets de débat. Les pays qui accordent un faible niveau de soutien continuent à s’inquiéter des incidences commerciales des niveaux de soutien élevés accordés dans d’autres pays. Compenser les exploitants pour les réformes mises en place constitue l’une des raisons majeures à l’origine de l’octroi de niveaux élevés de soutien.Dans de nombreux pays, il existe un intérêt à rétribuer les exploitants pour des services comme la gestion des ressources en terre, eau et écosystèmes, qui ne sont pas rémunérés par les marchés. L’objectif commun de tous les pays à poursuivre leurs intérêts internes est d’éviter de déprimer les marchés mondiaux et de faire peser une charge inéquitable sur les producteurs dans d’autres pays.
11. Nous reconnaissons tous que l’amélioration de l’accès aux marchés sur le plan mondial parallèlement à une réduction des distorsions des échanges résultant de mesures de concurrence à l’exportation, demeure une priorité pour la réforme internationale des politiques agricoles ; nous reconnaissons également que les obstacles non tarifaires aux échanges ne doivent pas être utilisés en remplacement des droits de douane. Les pouvoirs publics et l’industrie répondent tous deux à des consommateurs qui exigent de plus en plus souvent un large ensemble d’assurances sur les caractéristiques de qualité et de sécurité des produits alimentaires qu’ils achètent et sur leurs méthodes de production. Nous reconnaissons que des efforts doivent être faits pour permettre aux producteurs compétitifs dans toutes les parties du monde, de répondre à ces normes exigeantes et d’accéder aux marchés mondiaux. Nous avons examiné le rôle bénéfique que peut jouer le traitement préférentiel des tarifs appliqué aux importations en provenance des pays en développement, mais nous avons dans le même temps souligné que ces préférences ne devaient pas entraver les réductions tarifaires globales.
12. La réforme des politiques internes et commerciales est à l’origine de gains de bien-être au niveau mondial, mais il y a néanmoins des gagnants et des perdants. Nous avons examiné l’importance des politiques qui aident les individus, les secteurs et les régions affectés de manière négative dans leurs efforts pour faire face. Nous avons tous reconnu que la libéralisation des échanges devait s’accompagner de mécanismes nationaux et multilatéraux d’assistance bien ciblés et de réformes internes, de manière à permettre à toutes les nations de bénéficier de l’ouverture progressive des marchés agricoles. Mais nous avons aussi souligné que les besoins en ajustement ne devaient pas être utilisés comme excuse pour ralentir le processus de réforme.
13. Nous avons tous souligné que des progrès rapides doivent être réalisés dans les négociations commerciales multilatérales en cours. Ces progrès aideraient également à surmonter la résistance politique à la réforme interne. Nous confirmons à nouveau l’importance que revêt la dimension développement dans ces négociations, notamment en ce qui concerne l’agriculture. Pour que les pays en développement bénéficient du potentiel d’augmentation du commerce et de la croissance lié à une plus grande ouverture des marchés, l’aide au développement est nécessaire ainsi que le renforcement de leurs capacités commerciales, y compris à l’aide de mesures d’assistance technique bien ciblées.
14. Nous considérons que notre échange de vues à l’occasion de la Réunion à haut niveau a été bénéfique. Nous encourageons fortement l’OCDE à continuer à fournir des analyses des politiques à la fois pertinentes, pratiques et largement diffusées. Nous l’encourageons également à faciliter le dialogue et la coopération au sein d’un large ensemble de pays en vue d’aider nos pouvoirs publics à poursuivre leurs efforts de réforme des politiques et de développement économique. En particulier, nous apprécions les efforts de l’OCDE en vue de poursuivre l’ouverture et le dialogue avec les pays les moins développés afin d’améliorer non seulement la performances des politiques nationales mais aussi le fonctionnement des marchés agricoles mondiaux.