La Commission européenne a décidé d'engager des poursuites judiciaires contre la France, qui n'a pas donné suite à plusieurs arrêts de la Cour européenne de justice relatifs à six affaires séparées concernant la législation de l'UE sur la préservation de la nature, l'accès du public aux informations sur l'environnement, la protection de l'eau, les déchets et les micro-organismes génétiquement modifiés. La France risque de se voir infliger des amendes si elle ne met pas sa législation et ses pratiques en conformité. En n'appliquant pas correctement la législation européenne sur l'environnement, la France nuit aux efforts déployés pour préserver la faune et la flore d'Europe et sape les actions en faveur d'une meilleure gestion des risques pour l'environnement et la santé humaine.
Le commissaire responsable de l'environnement, Stavros Dimas, a déclaré: "Je suis inquiet de voir le nombre élevé d'arrêts de la Cour auxquels la France n'a pas donné suite. Il est indispensable de réagir vite et de manière efficace aux arrêts de la Cour, non seulement pour l'environnement, mais aussi pour montrer que les États membres prennent leurs engagements européens au sérieux."
Derniers avertissements écrits concernant le défaut de mise en conformité à la suite des arrêts de la Cour portant sur la préservation de la nature et l'accès aux informations sur l'environnement
La Commission a envoyé à la France d'ultimes avertissements écrits («avis motivés») au motif que celle-ci ne s'est pas conformée à trois arrêts de la Cour européenne de justice.
- Le premier avertissement concerne des sites naturels importants. Le 11 septembre 2001, la Cour a estimé que la France n'avait pas proposé suffisamment de sites pour protéger les espèces et les habitats indiqués dans la directive "Habitats" (affaire C-220/99). La directive demandait aux États membres de proposer, pour le mois de juin 1995 au plus tard, une série de sites destinés à protéger les espèces de plantes et d'animaux, ainsi que les habitats naturels les plus menacés faisant partie du réseau européen de zones protégées connus sous le nom de Natura 2000.
Si la France a fait des progrès en ce qui concerne le respect de cette exigence, les sites qu'elle a proposés sont insuffisants pour protéger une douzaine d'habitats et d'espèces comprenant notamment des forêts et des tourbières, ainsi que certaines espèces de poissons et de plantes.
Les retards accumulés par la France empêchent l'achèvement du réseau Natura 2000, qui constitue la contribution la plus importante à la protection de la biodiversité pour les générations futures.
- Le deuxième avertissement concerne également les sites naturels importants. Le 26 novembre 2002, la Cour a estimé que la France n'avait pas désigné suffisamment de sites pour protéger les oiseaux sauvages en vertu de la directive "Oiseaux sauvages" (affaire C-202/01). Les sites auraient dû être désignés en 1981. La France a procédé à un certain nombre de nouvelles désignations depuis l'arrêt de la Cour. La Commission estime cependant que le niveau global de désignation reste insuffisant. Un rapport scientifique remis aux autorités françaises (l'inventaire ZICO) répertorie 285 sites importants couvrant à peu près 8% du territoire français. Or, seulement environ 60% de ces sites a été désignée et le territoire total couvert ne représente que 2,6%, ce qui correspond au taux le plus faible parmi les anciens États membres.
- Le troisième avertissement concerne l'accès des citoyens à l'information en matière d'environnement. Le 26 juin 2003, la Cour a relevé plusieurs lacunes dans la législation nationale française en ce qui concerne la directive sur l'accès à l'information en matière d'environnement (affaire C-233/00). Sous réserve d'un certain nombre d'exceptions, la directive donne aux citoyens le droit d'obtenir des informations sur l'environnement détenues par les pouvoirs publics, ce qui est une condition préalable importante à leur participation au processus de décision.
La Cour a estimé, au vu de certains éléments, que la législation française restreignait trop l'accès à ces informations. La France a corrigé depuis lors toutes les carences relevées par la Cour, sauf une. Celle-ci concerne le fait que la législation française ne prévoit pas de disposition obligeant les pouvoirs publics, dans le cas où ils refusent implicitement de donner des informations sur l'environnement, à justifier ce refus auprès des citoyens dans un délai de deux mois à compter de la date de dépôt de la demande de renseignements. La France est en train de modifier sa législation, mais les amendements n'ont pas encore été notifiés à la Commission.
Premiers avertissements écrits pour non-respect des arrêts prononcés par la Cour
La Commission a envoyé une série de premiers avertissements écrits («lettres de mise en demeure») à la France, qui ne s'est pas conformée à trois arrêts prononcés par la Cour européenne de justice.
- Le premier concerne la législation de l'UE sur le déversement de substances dangereuses dans l'eau. Le 12 juin 2003, la Cour a estimé que la France n'avait pas correctement appliqué une directive européenne demandant aux États membres de préparer des programmes de réduction de la pollution par un certain nombre de substances dangereuses susceptibles d'endommager l'environnement en cas de déversement dans l'eau (affaire C-130/01). La France n'a pas encore adopté la législation requise.
- Le deuxième concerne les véhicules hors d'usage. La Cour a estimé, le 1er juillet 2004, que la France n'avait pas transposé une directive européenne visant à diminuer les déchets des véhicules à moteur parvenus à la fin de leur durée de vie utile (affaire C-331/03). Certains textes d'application manquent encore.
- Le troisième concerne la législation relative aux organismes génétiquement modifiés . La Cour a estimé, le 27 novembre 2003, que la France n'avait pas correctement transposé une directive européenne sur l'utilisation confinée des organismes génétiquement modifiés, notamment en ce qui concerne les plans d'urgence et l'information du public sur les mesures d'urgence (affaire C-429/01). Il manque encore des textes d'application corrects.
Procédure juridique
L'article 226 du traité habilite la Commission à engager une procédure contre un État membre qui manque à ses obligations.
Si la Commission estime avoir constaté une infraction au droit communautaire justifiant l'ouverture d'une procédure d'infraction, elle adresse à l'État membre concerné une «lettre de mise en demeure» (premier avertissement écrit), l'invitant à présenter ses observations dans un délai déterminé, généralement de deux mois.
En l'absence de réponse ou si la réponse fournie par l'État membre n'est pas satisfaisante, la Commission peut décider d'adresser à ce dernier un «avis motivé» (deuxième et dernier avertissement écrit). Elle y expose clairement et à titre définitif les raisons pour lesquelles elle estime qu'il y a eu infraction à la législation communautaire et appelle l'État membre à remédier à la situation dans un délai déterminé, généralement de deux mois.
Si l'État membre ne se conforme pas à l'avis motivé, la Commission peut décider de porter l'affaire devant la Cour de justice. Lorsque la Cour de Justice estime qu'il y a violation du traité, l'État membre incriminé est engagé à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à l'avis motivé.
L'article 228 du traité habilite la Commission à poursuivre un État membre qui ne s'est pas conformé à un arrêt de la Cour européenne de justice en lui adressant à nouveau un premier avertissement écrit («lettre de mise en demeure»), puis un deuxième et dernier avertissement écrit («avis motivé»). En vertu de ce même article, la Commission peut également demander à la Cour d'infliger des sanctions financières à l'État membre concerné.
Pour des statistiques actualisées relatives aux procédures d'infraction en général, consulter le site suivant:
http://europa.eu.int/comm/secretariat_general/sgb/droit_com/index_fr.htm
Pour les arrêts de la Cour de justice, voir à l'adresse suivante:
http://curia.eu.int/en/content/juris/index.htm