Comme le prévoit le traité d'adhésion, la Commission européenne a proposé aujourd'hui d'adapter les modalités d'adhésion de Chypre de manière à accueillir une île réunifiée le 1er mai 2004. Toutefois, cette réunification ne sera possible que si les deux communautés chypriotes, grecque et turque, approuvent le projet de règlement global présenté par les Nations unies lors des deux référendums distincts qui seront organisés le 4 avril prochain.
Concernant cette proposition, le commissaire à l'élargissement Günter Verheugen s'est exprimé en ces termes: "Lors des discussions qui ont eu lieu la semaine dernière en Suisse, les parties étaient très proches d'un accord. Nous sommes arrivés à un point où un leadership politique solide est nécessaire et je lance un appel pressant aux dirigeants chypriotes grecs et turcs pour qu'ils fassent l'impossible pour convaincre la population de l'île que le plan qui se trouve sur la table est la solution la meilleure et la plus équilibrée possible. La question n'est pas de choisir entre ce plan et un autre, mais entre ce plan et aucune autre alternative pendant de très longues années. En présentant cette proposition aujourd'hui, la Commission a fait ce qu'elle devait faire pour accueillir une Chypre réunifiée le 1er mai, la solution qui a toujours été de loin privilégiée par l'UE".
Le 31 mars 2004, le Secrétaire général des Nations unies, M. Kofi Annan, a présenté aux parties concernées la version définitive de son projet de "règlement global du problème chypriote". Son projet sera soumis au verdict populaire lors de deux référendums distincts, qui seront organisés simultanément dans les deux communautés chypriotes le 24 avril 2004, ainsi qu'il en a déjà été convenu par l'ensemble des parties, à New York, le 13 février 2004. En cas d'issue favorable, c'est une île réunifiée qui rejoindra l'Union européenne.
Il est bon de rappeler que le Conseil européen n'a eu de cesse de souligner qu'il était prêt à prendre en considération les conditions d'un règlement conformément aux principes fondateurs de l'Union européenne.
Le traité d'adhésion prévoit, dans l'hypothèse d'un règlement, une procédure spéciale d'adaptation des conditions relatives à l'adhésion de Chypre à l'Union européenne auxquelles il conviendrait de procéder pour tenir compte de la communauté chypriote turque. La base juridique sous-tendant le projet ci-joint d'acte d'adaptation est l'article 4 du protocole n° 10 de l'acte d'adhésion.
L'acte proposé prend en considération les conditions d'un règlement et reconnaît l'identité nationale particulière de Chypre et la nécessité de préserver un équilibre global entre chypriotes turcs et grecs. Il tient compte des importantes disparités économiques entre les (futurs) États constitutifs chypriotes et la situation économique du (futur) Etat constitutif chypriote turc en général.
L'acte prend aussi en considération les relations spéciales existant entre les chypriotes grecs et la Grèce d'une part et entre les Chypriotes turcs et la Turquie d'autre part. Il convient d'insister sur le fait que le projet d'acte ne prévoit pas de dérogations permanentes à l'acquis, mais seulement des périodes transitoires.
Le règlement global définitif assure que la république unie de Chypre soit en mesure de parler d'une seule voix et de participer pleinement au processus décisionnel de l'UE et que l'acquis soit correctement et effectivement appliqué dans l'île.
En cas de réunification, des élections fédérales et « locales » (États constitutifs) seront organisées le 13 juin 2004, conjointement aux élections pour le Parlement européen.
Comme elle s'y était engagée, la Commission organisera le 15 avril à Bruxelles une réunion à haut niveau afin de préparer une conférence de bailleurs de fonds visant à financer les besoins de relogement résultant de la mise en oeuvre du règlement global.
Annexe
Principaux éléments du projet d'acte
Le projet d'acte contient les principaux élements suivants:
*L'État chypriote turc peut demander, à titre non discriminatoire, l'autorisation d'acquérir des biens immobiliers, à hauteur de 85 % du PIB de l'État chypriote grec, dans un délai ne devant toutefois pas excéder 15 ans. Au cours de cette période transitoire de 15 années maximum, l'acquisition de biens immobiliers ne pourra être interdite, mais une procédure d'autorisation pourrait être appliquée sur la base de critères publiés, objectifs, stables et transparents et de manière non discriminatoire. La Commission rendra un rapport tous les cinq ans et pourrait recommander la suppression de ces restrictions.
*Le droit des citoyens chypriotes de résider dans l'autre État constitutif pourrait être restreint («restriction interne») durant une période transitoire de 19 ans maximum.
*Le droit de résidence à Chypre des ressortissants grecs et turcs pourrait être restreint durant une période transitoire de 19 ans maximum.
*En cas de détérioration grave de la situation économique dans l'État chypriote turc, des mesures de sauvegarde appropriées pourraient être prises pour une période de trois mois (seule la Commission étant habilitée à proroger ces mesures).
*Des modalités d'exécution de droits spéciaux en matière d'entrée et de séjour des ressortissants turcs qui soient compatibles avec le principe d'égalité de traitement entre ressortissants grecs et turcs et la participation de Chypre à l'espace Schengen seront négociées entre la Communauté et la Turquie dans les six mois à venir.
*Le turc sera l'une des langues officielles, dès lors qu'il aura été satisfait à certaines exigences d'ordre personnel et technique.